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VMEH : Ecouter derrière les mots

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L'art de la visite

La voie de l’engagement
Nous poursuivons notre série retraçant un engagement fort dans une cause ou activité.

 

Rendre visite à des malades à l’hôpital avec qui ils n’ont pas de lien de parenté ou d’amitié : c’est l’action fondamentale des membres de l’association « Visite de Malades en Etablissements Médicaux » (VMEH) – dont les origines remontent à l’œuvre de la Visite des Malades créée à l’Hôtel-Dieu de Paris en 1634, et devenue VMEH en 1953.

L’activité de la quinzaine de membres de la Section soissonnaise se concentre presque exclusivement sur l’Eclaircie, établissement de personnes âgées dépendantes rattaché à l’hôpital.

Monique Vigues entre Madeleine Dumont et Hubert Ister

Monique Vigues entre Madeleine Dumont et Hubert Ister

Pourquoi l’Eclaircie ? « Parce que nous manquons de visiteurs » répond Monique Vigues, présidente de la section. « Pourtant beaucoup de personnes âgées ne reçoivent aucune visite de proches. » VMEH cherche donc à élargir son action en attirant de nouveaux adhérents au Forum des Associations des 13-14 mai.

Devenir visiteur VMEH comporte des engagements : être disponible deux heures tous les quinze jours pour assurer la régularité des visites, facteur important dans la relation avec la personne malade ; avoir un entretien préalable avec deux responsables ; faire des visites accompagnées au début ; suivre une formation chaque année ; travailler en équipe. Il ne s’agit pas de s’y jeter sous l’effet d’une vague bienveillance, mais de mettre au clair ses motivations. Chacun y cherche des satisfactions, qui sont à reconnaître.

« Pas de problème pour moi, je sais parler. » Tel candidat croit abattre un atout. Mais la priorité qu’il donne à la parole est un signal d’alerte pour ceux qui le reçoivent. En face d’une personne malade l’intention est moins de lui parler à tout prix que de lui donner la parole, se montrer prêt à tout entendre, y compris ce qui peut la préoccuper derrière ses mots – ou rien. Le silence aussi peut être apaisant.

Comment approcher une personne malade ? « D’abord se taire » suggère Monique Vigues. Une écoute attentive permettra d’aborder ce qui compte. « La famille, les enfants, ce qui se passe, les nouvelles, autant que les douleurs, les attentes, les inquiétudes, les blessures de la vie, mais aussi les petites et grandes joies passées ou présentes. »

Dans une démarche collégiale qui reflète l’esprit d’équipe, trois membres ont parlé de leur action. Chacun confie le contexte de son engagement.

Monique Vigues, ancienne directrice d’école, et Responsable VMEH pour Soissons, attendait sa retraite et d’avoir accompagné sa mère jusqu’à la fin pour s’engager. Les deux événements n’ont été séparés que de quelques mois en 1996. « Pour ma première visite, je me suis retrouvée… dans la chambre où ma mère était morte. » Elle définit le point commun de son activité professionnelle auprès des enfants et l’activité de bénévole auprès des personnes âgées : « L’authenticité, l’être dénué du paraître. »

Pour Hubert Ister, qui avait été expert automobile, est le trésorier. VMEH représente un récent pas sur son long chemin de bénévolat, notamment avec la Conférence de Saint-Vincent-de-Paul. Pour Monique Vigues, il apporte un vent nouveau : « Il a regardé tous la documentation que nous mettrions sur notre stand pour le Forum, ne l’a pas trouvé assez attirante pour ceux qui passeraient, et a proposé le tournage d’un vidéo. » C’est une autre bénévole, Corinne Lafargue, qui s’en est chargée.

Madeleine Dumont, vice-présidente, est membre depuis longtemps. « Je m’entendais toujours bien avec les personnes âgées. Aux réunions de famille, on était content de me voir : « Tu pourras parler avec la grand’mère ! » Mère au foyer, un jour je me suis trouvée disponible. » Elle ne visite pas à présent, suite au décès de son époux. VMEH est attentive au bien-être de ses membres. Comme Monique Vigues, elle est émue en parlant de son engagement. L’émotion est fondamentale à leur engagement – mais se met en retrait face à la personne malade.

A côté de l’intimité des visites individuelles VMEH a d’autres activités, dont l’intention est d’élargir des horizons souvent rétrécis par la perte de mobilité et de facultés. Concerts, ateliers, spectacles et sorties sont organisés à l’Eclaircie, à l’établissement Saint-Lazare et à l’unité de Soins Palliatifs, en faisant appel à des animateurs et troupes. VMEH finance aussi des installations, un écran pour projeter des films de famille, un salon de jardin, des « jardins thérapeutiques », ou même la réfection d’un piano.

Ces activités et équipements sont financés par des subventions et aides, mais surtout par des donateurs privés, qui sont reçus et fêtés chaque année à une « Réunion de rentrée ».

Que reçoivent ceux qui visitent ? La question est importante : la « charité » peut atteindre à la dignité de celui qui le reçoit, s’il n’y a pas un équilibre de bienfaits de chaque côté de la relation. Madeleine, Hubert et Monique ont rédigé leurs remarques à ce sujet.

Madeleine Dumont. « Les après-midi que je consacre à mes visites sont précieuses pour moi. Je vais à la rencontre de personnes qui m’attendent ! C’est important de se savoir “attendue”. De constater que l’on peut apporter un peu de réconfort, par sa présence. Arriver à faire oublier un instant les tracas. Je suis souvent bouleversée et admirative d’entendre ces personnes me “raconter leur vie” : les guerres qu’elles ont vécues, le manque de confort de l’époque. Cela fait réfléchir sur soi-même, sur la vie actuelle …

Bien que ne visitant plus actuellement, j’ai voulu apporter mes ressentis antérieurs. En les écrivant je réalise encore davantage combien ces visites me manquent, car elles m’apportaient encore plus que ce que je donnais…. »

Hubert Ister. « Les personnes fragiles m’émeuvent beaucoup. A leur contact je me sens utile : j’ai envie de les écouter avec bienveillance. Cela me rend heureux. »

Monique Vigues. « Ces visites me permettent de rendre la bienveillante écoute qui m’a été accordée, de relativiser l’importance des écueils de la vie, de renforcer ma tolérance, d’être un maillon de cette belle chaîne d’humaine qui refusent la solitude de la souffrance dans la construction de plus d’humanité, et de m’amener à une paix intérieure. Une journée de visite est une belle journée, un cadeau de la vie où l’on reçoit beaucoup plus que l’on donne ! »

[Une version plus courte de cet article paraît dans le Vase Communicant n° 227.]

denis.mahaffey@levase.fr

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