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Simon le Mongol de l’Ouest

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L'art en voyage

Il est déjà assis quand j’entre dans le café, des papiers devant lui, un grand livre ouvert sur la table, un sac en tissu aussi grand à côté. Il ne peut qu’être la personne avec laquelle je vais m’entretenir à l’occasion de la sortie de son nouveau « carnet de voyage » – son seizième livre, me dira-t-il plus tard.

Il regarde, me remarque. Derrière son apparence, homme mince, bien mis, les traits fins mais marqués, je sens une vibration, une tête de radar qui tourne, saisissant tous les détails de son environnement.

Simon et les "Voyages d'encre" devant la chapelle Saint-Pierre.

Simon et les “Voyages d’encre” devant la chapelle Saint-Pierre.

C’est l’artiste, écrivain et voyageur Simon. Il habite depuis peu à Cachan – « J’aime les banlieues » – après avoir passé trois ans à Pékin avec sa femme, qui est chinoise, et leur fille. Il est à Soissons pour deux séances de signature de « Voyages d’encre, carnets de Chine 2005-2013 », avec les souscripteurs le matin (« Ils sont fidèles, et ont commandé assez pour couvrir les coûts d’édition »), le public l’après-midi.

« Je suis arrivé à Soissons il y a deux heures, et quand j’ai vu Saint-Jean-des-Vignes mon cœur battait. » Car il a passé des années près de Chivres-Val, où il a donné son premier stage d’aquarelle, avec « un trac terrible ». Il l’a vaincu, pour devenir professeur des « Pinceaux voyageurs », groupe d’artistes amateurs soissonnais.

Il raconte son itinéraire de vie. Le récit est un voyage en lui-même, constellé de réflexions, anecdotes, citations, noms de pays, villes et poètes. Ce regard en arrière devient un échange : nous nous trouvons des échos, des parallèles.

Il est né Jean-Yves Simon en Bretagne (« Quand j’ai publié mon premier livre, il y avait un autre auteur du même nom, alors j’ai décidé d’être juste Simon. ») En Chine il s’est fait dessiner un idéogramme de ce nom. « Mon » devient le caractère pour « Mongol » et « si » est « l’Ouest ».

Ce Mongol de l’Ouest a fait l’école de cinéma Idhec à Paris, puis les Beaux-arts, il a été à Londres, au Sahara, a vécu trois ans au Portugal, puis est arrivé à Verdonne – et est reparti pour la Chine, qu’il visite depuis dix ans.

« J’adore Pékin, C’est tellement excitant, l’énergie, la transformation matérielle et intellectuelle. Les Chinois ont démoli l’ancien pour faire du moderne. Maintenant ils démolissent le moderne pour reproduire de l’ancien. Ca a toujours été ainsi, depuis la dynastie Tang. » Il fait preuve d’une grande culture sans jamais s’appesantir.

Il y faisait tous les jours du vélo, 12 000 km en trois ans. C’est plus que la distance entre Paris et Pékin.

Simon sort du sac un de ses treize énormes carnets de travail. Je le feuillète, comme si j’étais derrière son épaule, à regarder ce monde, ces gens, se laisser croquer. C’est à peine si les images ne prennent pas vie. L’album vient de cette matière première : « J’ai échangé plus de deux mille messages avec l’éditeur. » C’est plus cohérent, plus policé, une distillation de sa vie en Chine.

« C’est le regard qui compte, non pas la technique – mais il faut aussi beaucoup de technique. » Il indique le petit doigt de ma main posée sur la joue. « Je relève un reflet entre cet ongle et une lumière plus loin dans la rue. » Le radar fonctionne donc en permanence.

Pour la photo, il propose le portail de la chapelle Saint-Pierre, dont la serrurerie aurait un style chinois. Et enfin nous faisons une découverte fréquente à Soissons : nous nous étions déjà rencontrés ; seule la formalité de l’entretien nous l’a fait oublier.

« Voyages d’encre, carnets de Chine 2005-2013 », éditions Akinomé, Grand prix du carnet de voyage Clermont-Ferrand 2015.

denis.mahaffey@levase.fr

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