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Musique

Entre guillemets moqueurs

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L'art de l’espièglerie chantée

La plus glamour et le faux naïf : Charlène Duval et Pascal Neyroud

« Paris chéri(es) » : déjà, le titre choisi par la compagnie Frivolités Parisiennes laisse entendre le ton du spectacle à la CMD. Ce ton est défini avec précision par le mot anglais « camp », qui décrit une façon de prendre une distance espiègle par rapport au sérieux, mais sans donner carrément dans le comique. Sur scène – ou dans la vie privée, pourquoi pas ? – le « camp » met des guillemets moqueurs autour la vie supposée grise du quotidien.

Cinq chanteurs, dont l’un est aussi maître des cérémonies, présentent un récital de chant, accompagnés par un pianiste et quinze musiciens de l’orchestre Frivol’Ensemble, installés derrière comme un big band américain. Ces instrumentistes écoutent minutieusement les chanteurs, rient de leurs blagues et mimiques, se balancent au rythme de la musique. C’est un moyen puissant de maintenir l’attention du public sur les solistes.

Le rôle d’une institution comme la Cité comprend le devoir de faire (re)découvrir, à côté des grands standards, un répertoire moins familier. Cette fonction est remplie par « Paris chér(ies) » dont le programme contient une vingtaine de chansons polissonnes d’entre 1910 et 1954 rarement entendues. Il a été dit après le spectacle que le voisin d’une spectatrice connaissait « Les ananas », c’est tout.

Ce répertoire est chanté – et dansé – avec élan, mais un élan taquin, comme si tous jouaient à jouer. Sentimentale ou endiablé, traînante ou exubérante, toutes les formes de la polissonnerie sont abordées. La crudité du sexe est transmuée en badinage.

Chaque chanteur est aussi un personnage qui se joue. Il y a la séduisante, l’anxieux, le frénétique. Pascal Neyron est le présentateur, un faux naïf qui charrie la salle avec une bonhomie aussi inébranlable que douteuse.

La plus remarquable du quintette est Charlène Duval, aussi la plus grande, la plus glamour avec son éventail emplumé, sa coiffure entre blonde et rose, ses jambes vertigineuses encaissées de soie, sa voix rocailleuse, et surtout sa gouaille – le tout imaginé par son créateur Jean-Philippe Maran.

Les artistes ont une musicalité fine, mais le résultat est aplati par l’amplification uniforme. Le son des voix et des instruments, au lieu de venir de chaque musicien, émerge pour chaque spectateur du haut-parleur le plus près de sa place. C’est dommage, dans une salle dédiée à la haute fidélité.

Le spectacle prend fin avec un refrain galopant repris et repris devant les applaudissements. Jusqu’à la dernière note, et jusqu’au dernier geste, les Frivolités Parisiennes maintiennent le ton, comme si elles nous regardaient d’entre leurs guillemets.

denis.mahaffey@levase.fr

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