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Théâtre

Même les Sea Girls ont du vague à l’âme

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L'art de la dérision emplumée

La question pouvait se poser. Les responsables de la programmation au théâtre du Mail nous avaient éveillé l’intellect, fait réfléchir, titillé le sens de l’humour, époustouflé le regard, émus, troublés, caressé les oreilles avec les spectacles 2016-17. Auraient-ils décidé d’administrer une bonne dose de vulgarité pour finir la saison, à faire croire que nous étions, non pas dans une respectable salle de province, mais aux Folies Bergères, au Lido, voire au Crazy Horse ?

Les dessous des Sea Girls

Paillettes, strass, boas, plumes à gogo et des jambes longues, longues en bas résille, « Les Sea girls » utilisent tous ces ingrédients, chantent, dansent, descendent un escalier aux marches éclairées. Mais il est évident, dès le début quand leurs huit jambes passent devant une ouverture en montant vers le haut de cet escalier, et qu’on aperçoit une main qui gratte vigoureusement un mollet, que la soirée sera placée sous le signe moins de la glamour que de la dérision.

De glissades sur les marches en bousculades venimeuses, de bouderies en concurrence déloyale, Delphine Simon, Prunella Rivière, Agnès Pat et Judith Rémy pourraient être des chômeuses se recyclant désespérément, comme les hommes du « Full Monty », plutôt que des artistes de cabaret.

Chacune des quatre a son caractère, et l’idée de former un « ensemble » leur est étrangère. La plus jeune et la plus frénétique (Agnès Pat) est aussi la plus tarte. La plus grande de taille (Prunella Rivière), et qui ressemble furieusement à Maria Callas, tente d’exercer son autorité sur les autres sans succès. La troisième (Judith Rémy) essaie de temps en temps d’élever le niveau culturel en esquissant des pas de « La mort du cygne », mais Saint-Saëns fait défaut. La quatrième, ah la quatrième (Delphine Simon)… Elle n’a ni le corps de rêve ni le tempérament qu’il faut pour séduire un public, et elle cultive la mauvaise volonté.

Deux grands moments d’ineptie : un tour de magie avec la télékinésie d’un corps derrière deux voiles, sauf que l’astuce est flagrant car il y a deux corps ; et une séance de danse érotique qui vacille entre pitoyable et vaguement indécente.

Un naufrage pour terminer la saison, alors ? Non. Il faut énormément de talent pour réussir une telle inaptitude. Elles ont de belles voix pour les effets sonores inattendus, des qualités évidentes de danseuse pour trébucher avec tant d’entrain. Pour jouer au second degré comme elles font, il faut de solides compétences au premier.

L’intelligence n’était pas donc absente de cette fin de saison : elle était déployée pour se moquer finement de la vulgarité que nous pouvions redouter. Il ne fallait pas prendre les paillettes, plumes, strass et longues, longues jambes pour argent comptant.

denis.mahaffey@levase.fr

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