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Le Vase des Arts

Paroles sans musique

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L'art du parolier

« Mec ! » avec Philippe Torreton au Mail

Attendant le début du spectacle dans la petite salle du Mail*, Louis Abboud et Maël Decarnelle, élèves de Quatrième dans la « classe théâtre » du collège Saint-Just, parlaient de leur rencontre avec Philippe Torreton quelques heures plus tôt. Ils avaient été impressionnés. « Il répondait très longuement à nos questions. » Il avait admis « qu’il a fait du théâtre parce qu’il était timide. » Il avait surtout déclaré que le théâtre était « un moyen d’apprendre quelque chose de l’Homme – avec un grand H ».

L’acteur est alors entré en scène, accompagné d’Edward Perraud, percussionniste fantasque qui allait fournir, moins un accompagnement sonore qu’une sorte de ponctuation des mots.

Philippe Torreton a dit les paroles de chansons écrites par le chanteur et parolier (mais non pas compositeur) Allain Leprest. La musique n’allait-il pas manquer ? Non, car son absence laissait apprécier les couleurs, la force, la portée des mots, que le chant n’aurait pu que rendre secondaires à la musique. L’acteur les a investis d’une énergie modulée selon l’ambiance du numéro, en émergeant chaque fois d’un moment de silence, d’immobilité, d’obscurité.

Surtout, le spectacle révèle les différences entre paroles de chanson et poésie : images immédiates, raccourcis constants, pas de développement comme il est possible (non pas obligatoire) d’en avoir dans un poème. En bref, la poésie peut prendre son temps, les paroles de chanson n’ont que le temps d’une mélodie, leurs images que la longueur d’un couplet. Voici les premiers vers de « Nu », pour lesquels Philippe Torreton a pris un ton urgent, comme si les mots allaient lui échapper :

Nu, j’ai vécu nu
Naufragé de naissance
Sur l’île de Malenfance
Dont nul n’est revenu.”

Edward Perraud, percussionniste fantasque

De l’autre côté de la scène, Edward Perraud ajoutait les sons, le corps tout en mouvement, le geste gracieux. Loin du simple batteur, il faisait penser à Jean-Jacques Lemêtre qui tout seul joue des dizaines d’instruments lors des spectacles du Théâtre du Soleil.

Dans « Le mime », Philippe Torreton raconte l’histoire malheureuse d’un couple, femme qui parle et mime qui… mime. Edward Perraud a alors fait tous les gestes du percussionniste penché sur ses instruments, mais sans produire un son. Le spectacle dépassait la performance pour atteindre le sublime.

* La directrice du Mail Sabrina Guédon a choisi de faire jouer Philippe Torreton dans la salle du sous-sol. « J’ai hésité, puis je me suis dit que je ne pouvais pas le mettre dans la grande salle. » Le résultat : une intimité entre ce qui se passait sur scène et les réactions du public.

denis.mahaffey@levase.fr

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