Connectez-vous avec le Vase

Théâtre

Mourad Merzouki : la boxe poétique

Publié

le

L'art de la danse

Mourad Merzouki, chorégraphe-star du hip-hop, sait faire des rapprochements d’éléments disparates pour créer ses ballets. Pixel, venu au Mail en 2016, mêlait des images numériques à la danse, non pas en supplément décoratif à la mode, mais qui éclairaient en s’y intégrant les mouvements des danseurs. Des points blancs, comme des flocons de neige, étaient déviés par des parapluies, ou par le souffle d’un danseur ; un immense mur, également numérique, s’est effondré sur la scène.

Dans Boxe boxe Brasil au Mail il met ses danseurs, avec leur grâce et richesse physiques, dans le milieu plutôt primaire de la boxe. Ils portent parfois des gants de boxe qui enlèvent toute souplesse aux mains, ou un casque disgracieux. Ils s’engagent dans des combats.

Le ring au début du ballet

Mais tout est transformé par la danse. La brutalité des coups devient poétique, les combats sont des affrontements plein d’imagination. Merzouki fait de la boxe une allégorie dans laquelle les hommes parlent ensemble le langage de la boxe pour exprimer sans violence leur énergie. La confrontation devient conversation.

Le ballet avait été créé en 2009, mais Merzouki l’a repris et adapté pour un groupe de danseurs brésiliens. Cette version leur permet d’accomplir des exploits hip-hop : un des danseurs tourne, tourne sur la tête comme une toupie, alors qu’il s’agit d’un crâne et d’un corps si peu aérodynamiques.

Un troisième élément presque contradictoire est la présence sur scène des quatre musiciens du quatuor à cordes Debussy qui accompagnent en musique – loin du répertoire hip-hop – les boxeurs, en les entourant, debout ou assis dans d’extravagants fauteuils de fer forgé, se propulsant autour du plateau avec leurs pieds. La musique de chambre s’insinue dans une salle de combat.

La combinaison de ces éléments fait de l’univers de la boxe, avec ses relents de joute barbare, un ensemble subtile, plein de grâce musclée et d’humour.

La mortalité se fait entendre aussi, dans la partie la plus poignante du ballet, rappelant que la puissance d’un boxeur a ses limites dans le temps, que l’exubérance d’athlète est épuisée par le métier qu’il choisit.

Sur une musique de Dvorak, le mouvement lent de son quatuor « Américain » op. 96, un boxeur se bat, se débat, s’essouffle à poursuivre, laisse la rage l’envahir jusqu’à porter des coups à des raquettes tendues autour de lui. Sa force le quitte, mais il ne veut pas l’admettre, essaie encore et encore à poursuivre le combat, à être le Meilleur (*), mais il est battu, non pas par ses adversaires mais par sa propre déchéance.


(*) La boxe est brutale, mais Mohammed Ali savait en faire une danse, lui qui prétendait « voler comme un papillon, piquer comme une abeille ».

Continuer la lecture
P U B L I C I T É

Inscription newsletter

Catégories

Facebook

LE VASE sur votre mobile ?

Installer
×