Connectez-vous avec le Vase

Portrait

Michel Fiévet : « une porte, dix autres portes, mille autres »

Publié

le

La voie de l'engagement

Le troisième d’une série de portraits qui retracent le vécu et les valeurs menant à un fort engagement dans une cause ou activité

Ce nOLYMPUS DIGITAL CAMERAe sera pas un échange quelconque de propos. Michel Fiévet se méfie des mots comme un poète qui y attache une importance suprême. Il a été mal cité dans le passé, et admet son inconfort. La rencontre aura lieu dans le bureau de sa maison à Mercin-et-Vaux. « Jamais personne d’autre n’y entre, c’est la première fois. » La petite pièce contient une table de travail et des livres, dont beaucoup de minces volumes de poésie et, parmi quelques objets, un crucifix de style moderne.

Il parle pourtant avec aisance et éloquence, surtout au sujet de la poésie. « C’est un bois flotté que tu ramasses sur la plage. Il te parle. Il t’interroge. Ca ne sert à rien un bois flotté, et pourtant… il t’en raconte des choses. Tu découvres le grand silence qui est au fond de toi. »

Michel est né dans un milieu communiste, à Denain. Son itinéraire politique reflète sa recherche constante de sens. Jeune adulte, il adhère lui-même au Parti à Chauny, où il a son premier poste d’instituteur. « Je vendais l’Humanité Dimanche devant la gare. » Après neuf mois (« le temps d’une gestation ») il quitte ce qu’il voit comme une structure sclérosée. « Je suis devenu de plus en plus libertaire. » Depuis, il milite pour les droits de l’homme, les migrants et Amnesty. Il est syndicaliste.

Sa scolarité avait été « compliquée », jusqu’au moment où, menacé d’expulsion, il se prend en main. « De 3 en chimie à 19,3. » Après un BTS en biochimie à Reims, il travaille dans un laboratoire d’analyses à Laon, s’occupant des premiers cas du Sida dans l’Aisne. Mais l’ambiance lui déplaît. Il passe le concours IUFM, le réussit, et en 1990 devient instituteur.

Il enseigne à présent à Fontenoy. Dès le début il s’est promis de « faire en sorte que les élèves soient contents de venir à l’école. » Chaque matin il consulte le progrès de la course du « Vendée Globe », puis fait travailler la classe sur les pays le long de la route (géo), les vitesses (maths), le rattrapage par un retardataire (physique). Ainsi les enfants apprennent par les échos du monde, pas seulement dans les livres.

Il avait découvert la poésie au lycée de Creil « d’abord à travers la chanson, Ferrat, Brassens. Puis j’ai lu Eluard à la bibliothèque, et j’ai eu le désir d’écrire des poèmes. » Plus tard il publie « L’écorché vif ».

La poésie lui a valu de riches rencontres. Une religieuse avec laquelle il est devenu ami lui a proposé, en hésitant, un cadeau. C’est le crucifix de son bureau. « Je suis athée, mais il m’est précieux. »

Il préside « Demain dès l’aube », association de promotion de la poésie par la lecture à haute voix. Par ailleurs il envoie par Internet deux poèmes par semaine à ceux qui le demandent (encreviolette02@orange.fr). Des centaines de lecteurs goûtent ainsi les derniers recueils comme des poètes établis.

En réponse à une demande d’extrait de son recueil, il envoie un vers :

                      Dis-moi la couleur de ton rêve enfant.

Pour Michel, un poème « ouvre une porte, dix autres portes, mille portes ». A chacun, à partir de ces huit mots, d’ouvrir ses propres portes.

Denis Mahaffey
denis.mahaffey@levase.fr

La poésie selon Michel Fiévet

« Une certaine façon de parler des choses de la vie d’une manière gourmande. Un mot donne accès à mille autres mots par son signifiant. La poésie me parle de mes doutes, de mes colères, de mes désirs. Elle m’interpelle sur ce que je suis et me donne une certaine lecture du monde.
  La poésie, c’est un bois flotté que tu ramasses sur la plage. Il te parle. Il t’interroge. Ca ne sert à rien un bois flotté, et pourtant… il t’en raconte des choses. Tu découvres le grand silence qui est au fond de toi. On n’en a jamais fini avec l’inconnu. Il est multiple, infini.
  Du coup, c’est une certaine manière de vivre. « Un autre monde dans le monde » a dit J.-P. Siméon « mais plus vaste. »
Comme une luciole tu apprivoises la nuit. Laisse les mots là et reviens demain pour le grand vertige. »

Continuer la lecture
P U B L I C I T É

Inscription newsletter

Catégories

Facebook

LE VASE sur votre mobile ?

Installer
×