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La peur au Mail

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L'art du questionnement

« Pourquoi avons-nous peur ? », conférence d’Eric Fiat au Mail   

Il y a tant de peurs : peur de rater un examen, peur des araignées, peur de la mort. Revenant pour sa troisième conférence à l’invitation de l’association Jalmalv (« Jusqu’à la mort accompagner la vie »), le philosophe Eric Fiat aurait pu se mettre à analyser ces formes de peur l’une après l’autre, dans le but de les neutraliser.

Au lieu de cela il a fait projeter sur grand écran les paroles du « Roi des Aulnes » de Goethe, et diffuser la partition de Schubert, chantée en allemand par Fischer-Dieskau accompagné au piano par Gerald Moore. Un père rentre chez lui la nuit à cheval, son fils dans les bras, poursuivi par une créature maléfique qui réussit à voler l’âme de l’enfant. Eric Fiat soumet l’histoire à une lumineuse explication de texte. Il identifie la peur de chacun des personnages : père, fils, esprit malin et… le cheval, dont le piano traduit le galop. L’enfant ressent sa peur, mais n’arrive pas à la faire comprendre à son père. Le père agit comme les philosophes des Lumières tel que Spinoza qui, en niant les obscurs fondements de la peur, prétendaient en libérer les hommes. L’esprit malin a peur de ne pas séduire et, quand il n’y arrive pas, a recours à la violence. Le cheval évoque pour Eric Fiat les forces contradictoires qui, selon Platon, tiraillent l’âme entre le cœur et les instincts.

L’exposé est brillant et clair. Eric Fiat utilise son érudition, non pas pour impressionner le public, mais pour créer une complicité pleine d’humour.

Il passe aux sources de ces peurs. « L’homme est le seul être au monde conscient d’exister entre deux néants. » Chacun vient du néant par l’accident d’une rencontre entre un homme et une femme, et y retourne à la mort. Eric Fiat se moque gentiment de l’axiome du Grec Parménides selon lequel « l’être existe, le néant n’existe pas », y trouvant un truisme digne de Johnny Halliday (une cible qu’il affectionne et qui aurait annoncé que « il n’y a rien de mieux que la perfection »). Plus que cela, ce serait erroné. Pour lui, le néant est une morsure dans l’existence, un rappel constant du danger d’anéantissement, à l’origine de notre peur de la mort.

Une partie du public a pu espérer une réponse à une autre question : comment gérer la peur ? En abordant exactement la question posée par le titre de la conférence – le pourquoi de la peur – Eric Fiat a donné une réponse philosophique, en ce sens que, plutôt que de mettre fin au questionnement, elle l’éclaire et l’intensifie.

denis.mahaffey@levase.fr

 

 

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OLYMPUS DIGITAL CAMERALes élèves de Quatrième « Classe théâtre » du collège Saint Just, intervenus en prélude de la conférence avec un catalogue poétique des peurs.

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