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Les accompagnants dînent au théâtre

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L'art du dîner/spectacle

Olivier Lenormand recadre les choses.

Olivier Lenormand recadre les choses.

« En avant Courteline ! » au théâtre Saint-Médard, jusqu’au 19 décembre   

Une douzaine des tables à quatre places dans la salle du café-théâtre Acaly ont été alignées pour faire une grande tablée d’une trentaine de personnes. Des adultes, plus de femmes que d’hommes, discutent, rient, s’interpellent. L’ambiance est chaleureuse, festive sans devenir chahuteuse. Cela ne peut être qu’une soirée associative. Mais dans quel domaine ? Une chorale, une amicale d’anciens de lycée, des danseurs de salsa ?

Ces dîneurs qui s’amusent sont les mêmes qui, à l’hôpital, à domicile et dans des maisons de retraite, accompagnent les personnes gravement malades et en phase terminale. Ils font partie de « Jalmalv en Soissonnais », antenne locale de « Jusqu’à la mort accompagner la vie ».

Leur présence ici, et l’ambiance enjouée qui les entoure, est en partie une réponse à ceux qui leur demandent « Mais comment faites-vous pour ne pas sombrer ? » Avoisiner la fin de vie exige d’avoir un regard clair sur soi-même, de comprendre le sens de son action, et aussi de savoir sortir à chaque fois d’un accompagnement et reprendre sa propre vie. Les accompagnants travaillent chaque mois en « groupe de parole » pour échanger, déposer ce qui a pu être pesant. De toute façon, ils disent recevoir autant qu’ils donnent. « Nous apprenons à accepter l’autre tel qu’il est, sans le juger, et cette attitude tend à prévaloir aussi entre nous » dit un membre de Jalmalv.

C’est aussi une soirée de théâtre. Trois des personnes qui ont servi à table enlèvent leur tablier et montent sur scène, pour jouer avec une quatrième « En avant Courteline ! », une série de neuf saynètes de ce peintre de la frustration. Frustration du citoyen devant la bureaucratie, du contrôleur de bus devant une passagère sans petite monnaie, du vendeur devant un client déraisonnable, même de celui qui tente de faire comprendre qu’un angora n’est ni un « gora » ni un « nangora » ni un p’ti « tangora ».

Cécile Migout au tableau.

Cécile Migout au tableau.

Le spectacle, donné au Mail lors de la « Semaine de la création théâtrale » 2015, a été retravaillé, développé. Fabien Dardenne étant indisponible, le duo devient un quatuor, Olivier Lenormand, Christine Moitié et Constance Parizot autour de Cécile Migout, dont le rôle prépondérant lui a valu d’être dispensée de servir à table. « C’est un marathon » dit Fabrice Decarnelle, directeur du théâtre.

Cécile Migout est une battante du comique, n’épargnant aucun effort pour amuser son public. Son visage mobile affiche tout un répertoire d’expressions. Les quatre comédiens maintiennent la frénésie qu’il faut, du début à la fin.

La soirée comprend un dîner, alors finissons par une mention gastronomique. Deux végétariens, souvent mal lotis dans un restaurant, ont mangé, au lieu de la trop fréquente assiettée de légumes fades ou l’inévitable omelette, un feuilleté de Reblochon suivi de tagliatelle de légumes au gratin. Je confirme : c’était délicieux.

denis.mahaffey@levase.fr

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