Connectez-vous avec le Vase

Théâtre

Père et im-père

Publié

le

L'art de la paternité au théâtre

Il y a eu comme un petit décalage pour le public au début de « Moins 2 », dû à la présence de Guy Bedos, comique militant, dans un spectacle au ton élégiaque, où la comédie tient plutôt de l’absurde. Les rires se sont ajustés. A la création de la pièce de Samuel Benchetrit en 2005, les deux rôles principaux étaient tenus par Jean-Louis Trintignant et Roger Dumas, et les choses devaient être plus claires.

Ce spectacle allait ouvrir la saison culturelle soissonnaise en avant-première de sa création à Paris, mais a été remis à plus tard. Sabrina Guédon, directrice du Mail, explique que « le metteur en scène avait simplement trouvé que la pièce n’était pas prête ». Il arrive donc après et non pas avant Paris.

Dans un service de réanimation, deux hommes reliés – apparemment – par le seul fait de devoir mourir d’un cancer, l’un dans une semaine, l’autre dans deux, décident de partir en vadrouille. Oh, pas loin, car ils sont en pyjama et pantoufles, l’un d’eux encore attaché à sa perfusion. Ils croisent du monde : une femme enceinte et abandonnée, une fille légère, un homme suicidaire (*).

Paul, joué par Guy Bedos, et Jules, joué par Philippe Magnan, discutent, se chamaillent, finissent par former un drôle de couple et se confient. Paul admet s’être sauvé avant la naissance de son enfant. Il est donc père, mais n’a jamais vécu en tant que tel. Jules a eu trois enfants avec sa femme, avant de découvrir qu’il était stérile. Il n’est donc pas père, mais a toujours vécu en tant que tel. Paul a vécu dans la vérité de l’abandon de sa famille, Jules dans le mensonge de sa vie familiale. C’est lui qui convainc Paul à chercher son enfant, à se comporter comme le père qu’il est.

La scène des retrouvailles est un bel exemple du « théâtre de l’absurde ». Les deux moribonds montent sur la scène où la fille de Paul joue dans « Oncle Vania ». C’est la scène du Mail. Etonnés, ils nous regardent. De spectateurs dans un théâtre nous devenons des spectateurs de théâtre.

Père et fille se rencontrent. L’humour, le jeu et la mise en scène étaient plutôt mesurés jusqu’alors (des spectateurs ont dit avoir eu du mal à entendre les voix), mais tout finit lumineusement, par les paroles de Tchekhov dites par Sonia – baignée de lumière elle-même :

« Nous entendrons les anges. Nous verrons tout le ciel en diamants ; nous verrons tout le mal terrestre, toutes nos souffrances, noyés dans la miséricorde qui emplira tout l’univers ; et notre vie deviendra calme, tendre, douce, comme une caresse. Nous nous reposerons. Nous nous reposerons… »

* Tous ces rôles étant tenus par Manuel Durand et Audrey Looten.

denis.mahaffey@levase.fr

Continuer la lecture
P U B L I C I T É

Inscription newsletter

Catégories

Facebook

LE VASE sur votre mobile ?

Installer
×