Hip-hop : la force transformée

«Silence on tourne !» au Mail, 11 février

Rarement un spectacle au Mail a dû se terminer par un tel geste de générosité. Les neuf hommes de la« Pockemon crew », danseurs hip-hop, ont invité ceux qui voulaient à monter sur scène avec eux et, pour les apprentis danseurs parmi eux, à profiter de la scène, du public et de l’ambiance électrique pour faire un solo. La salle était debout, les applaudissements se calquant sur les rythmes de la bande sonore. Les jeunes faisaient preuve de la combinaison de concentration et de nonchalance qui caractérise le danseur hip-hop.

«Silence on tourne !» prend la forme d’un vague hommage dansé au cinéma des années 30. Ce n’est que le fil rouge qui justifie une profusion de danses d’ensemble et de solos, des figures spectaculaires de prouesse physique : les jambes font les ciseaux, le corps des rotations, les danseurs tournoient sur la tête, se tiennent debout sur une main, sautent à l’envers, font onduler le torse et les membres, miment des mouvements robotiques. Chacun a son style, ses gestes, non seulement pour épater le public, mais aussi pour aiguillonner les autres. C’est la «battle», qui fait penser à la danse irlandaise masculine et son égal désir d’époustoufler.

Danser sur la tête devant des spectateurs sur scène.

Le hip-hop demande autant de discipline corporelle que la danse classique. Seulement, alors que le ballet constitue un défi à la pesanteur, les danseurs dissimulant tout effort pour paraître flotter, les danseurs hip-hop s’appuient sur le sol, ne le quittent que pour redescendre comme si le corps y retrouvait son niveau.

Cette danse, création de milieux défavorisés, montre qu’une des façons de s’en sortir est de transformer la force, qui pourrait mener à la violence, en grâce et en beauté.

denis.mahaffey@levase.fr