Un fauteuil roulant dans lequel une femme est assise traverse la scène de droite à gauche, un deuxième de gauche à droite. Ils reviennent. Une troisième femme s’appuyant sur une canne les rejoint. Les fauteuils se mettent à tournoyer. C’est « Noughts and crosses » de Diana McKenzie (celle qui marche avec la canne), premier des six ballets de « Trace », spectacle de danse monté par « All bodies dance » au Roundhouse de Vancouver. Ce projet rassemble des personnes à mobilité réduite et pleinement mobiles pour danser ensemble. Selon la directrice Naomi Brand, « les différences sont considérées comme des ressources alors que nous explorons les possibilités chorégraphiques des fauteuils, béquilles et cannes, et (…) différentes façons de bouger et formes de perception ». Le nom même du projet le déclare : « Tous les corps dansent ».
L’appréhension d’être mal à l’aise devant des corps hors normes, ou déstabilisé par un sentiment de pitié, est vite rangée aux vestiaires. C’est la danse qui compte. Quand Adam Grant Warren, par exemple, quitte son fauteuil et se tire sur les coudes, cela devient dans ce contexte non seulement émouvant, mais surtout un mouvement chorégraphique. L’admiration s’impose, non pas devant le « courage » des danseurs, mais pour leur art. Les danseurs pleinement mobiles ne font pas d’exploits corporels : tout le monde est dans le même registre physique.