Les participants à la Journée sectorielle, organisée par Amsam.
Journée sectorielle soins palliatifs, auditorium du Mail.
« Une gerbe de poussière dorée s’est alors échappée du livre. Le grenier a disparu. Nous nous sommes retrouvés dans un grand champ inondé de soleil. Avec Alice et Johnny, nous pique-niquions au bord d’un ruisseau. »
Une fois par an, les équipes de différentes unités prenant en charge les personnes en fin de vie aux hôpitaux de Soissons, Château Thierry et Villiers-Saint-Denis, à l’Amsam et au réseau Cécilia, se retrouvent avec les bénévoles de Jalmalv («Jusqu’à la mort accompagner la vie»), pour faire le point sur leurs action. Le sujet cette année : «Coordonner les soins hôpital-domicile».
Les soins et l’accompagnement d’un patient nécessitent souvent un transfert – qui peut devenir une navette – entre son domicile et les services hospitaliers. L’objectif est d’éviter des heurts et lacunes, en partageant les pratiques. A part les présentations et débats, l’importance d’une telle rencontre est de passer simplement une journée ensemble, professionnels et bénévoles (qui « ne sont pas utiles, mais indispensables » selon leur représentante). Les difficultés sont cernées, des erreurs même admises, pour mieux parer à leur répétition.
Deux participants, la psychanalyste Martine Derzelle et l’écrivain Lucien Rosenblat, ont évoqué l’alternative ultime qu’affronte souvent une personne devant la mort : décéder à l’hôpital ou à domicile.
Martine Derzelle a donné une statistique éloquente : 81 pour cent des patients souhaitent terminer leur vie chez eux ; seuls 25,5 pour cent de décès ont lieu à domicile. Un échec alors ? Elle nuance les enjeux, scrute les réalités de la situation, décortique les notions d’intimité, de refuge.
Alice attend Johnny (ill. Anita Nelson).
D’ailleurs, « chez soi » et « à la maison » veulent-ils dire la même chose ? Lucien Rosenblat a lu sa nouvelle « Chez moi » pour illustrer la différence. Johnny, policier cabossé par la vie, et malade à l’hôpital, réclame de rentrer « chez lui ». Un jour il disparait. Il n’est pas à la maison. Un collègue se met à sa recherche avec un chien policier, qui le piste jusqu’à la bibliothèque publique. Johnny y lit un grand livre. « C’est ‘Alice au pays des merveilles’ » explique le chien. Le chien ? « Nous sommes entrés dans le livre. » C’est alors que la gerbe de poussière dorée s’échappe. Pour Johnny le malmené, « chez moi » est un petit paradis de fantaisie et de magie sur terre, en attendant un hypothétique paradis au ciel.
denis.mahaffey@levase.fr
[Modifié le 15/06/15 à 20h43 pour rectifier la liste des participants.]