Connectez-vous avec le Vase

Histoire

La première de Lucrèce

Publié

le

L'art de la tragédie

Cécile Migout est Lucrèce Borgia.

« Impressionnant » : un mot échangé par les spectateurs dans le grand double escalier du Mail à la sortie de « Lucrèce Borgia », que venait de présenter la compagne soissonnaise Acaly.

Le ton employé pour le mot contenait un élément de surprise : en venant au spectacle, le public pouvait ne pas être sûr que la compagnie serait capable de le réussir. Ils connaissaient les comédies exubérantes qui remplissent le théâtre Saint-Médard, scène attitrée d’Acaly, comme ses spectacles parfois délirants pour jeunes, toujours avec un message écologique. En étant sélectionné pour une « résidence de création » d’un an au Mail, Fabrice Decarnelle, directeur et metteur en scène d’Acaly, n’avait-il pas eu les yeux du projet plus gros que le ventre de la mise en œuvre ? La tragédie de Victor Hugo exige des comédiens qui puissent porter toute sa noirceur, être à la hauteur de ses excès de parole et d’émotion, et un metteur en scène capable de lier tous les ingrédients pour en faire un plat que goûterait le public.

…les beaux regroupements de personnages sur scène…

Pour avoir assisté à plusieurs répétitions au cours de l’année, en novembre, en janvier et quelques semaines avant la création, je savais que la construction de la pièce avançait, que la vision du metteur en scène et le jeu des acteurs  pour la transmettre prenaient forme, et que la scénographie, ces bandes translucides qui s’adaptent pour cadrer chaque acte, représentaient plus qu’un simple décor de scène. Mais juger un spectacle d’après les répétitions c’est un peu comme donner son opinion sur un banquet après être passé dans les cuisines où il est préparé.

La première, devant une salle bien remplie, a confirmé la réussite éclatante du projet. Cécile Migout a su dominer la scène par sa présence, en communiquant l’angoisse de cette femme qui voudrait se racheter d’un passé de crimes et de débauches, et qui perd son fils et sa vie précisément parce qu’elle ne peut pas se détacher des méthodes de ce passé. Elle a transmis la force d’une femme qui a l’habitude du pouvoir, et la faiblesse de celle que ce pouvoir ne peut pas aider.

En face d’elle Sylvain Pierre est Gennaro, le fils qui nourrit une admiration passionnelle pour sa mère disparue, alors qu’il ignore que celle qu’il condamne pour son comportement est cette mère. Il montre la fougue, la jeunesse, l’arrogance et l’entièreté du personnage. Physiquement, il justifie les mots de Lucrèce quand elle le voit pour la première fois : « Je ne l’avais pas rêvé plus beau. »

Autour de ce couple central, douze autres comédiens créent l’ambiance faite de camaraderie et de trahison voulue par Hugo.

Gennaro menace Lucrèce avec sa dague.

La plupart des personnages masculins sont joués par des femmes, peut-être simplement parce qu’elles sont plus nombreuses dans la compagnie ; mais ce choix rappelle qu’on est au théâtre, où les acteurs ne sont pas les personnages mais les jouent. La masculinité peut se clarifier lorsqu’une femme l’assume pour son rôle.

Une quinzième personne, sur scène du début à la fin, est le percussionniste Martin Vanlemberghe, qui accompagne l’intrigue en direct, en donnant de belles couleurs sonores contemporaines à ce monde de la Renaissance.

Un atout énorme du spectacle est la clarté de diction de la plupart des acteurs, et qui n’est pas toujours assurée dans les productions qui viennent au Mail. La prose somptueuse hugolienne est toujours audible : même au fond du plateau, et sans monter le volume, les voix sont projetés jusqu’au dernier rang de la salle.

La musique, l’éclairage, les beaux regroupements des personnages sur la scène contribuent à une mise en scène sobre et rythmée d’un texte plein d’éxcès.

Tout est parfait, alors ? La scène de la beuverie vers la fin ne convainc guère, mais il est notoirement difficile de jouer l’ivresse sans tomber dans l’exagération. Serait-il possible de rendre cette ivresse moins gesticulante, plus intérieure, moins une meute de fans de foot, plus une lente dégringolade dans l’apathie ethylique ?

Voilà. Avec ce spectacle, Acaly fait face aux exigences du grand mélodrame sans perdre le contrôle méticuleux de ce qui se passe sur scène. Prenant la parole à la fin, Fabrice Decarnelle a annoncé une tournée sur cinq ans. « Lucrèce Borgia » ouvre de nouvelles portes, agrandit les horizons, gagne un nouveau respect pour Acaly.

denis.mahaffey@levase.fr

Continuer la lecture

Histoire

Auguste Hiolin, sculpteur soissonnais

Publié

le

L'art du statuaire

Monument de la pl. de la République à Soissons (photo de P. Ponsart-Ponsart)

L’homme de lettres Pascal Ponsart-Ponsart, de la Société Régionale Historique de Villers-Cotterêts, donnera une conférence sur le sculpteur Louis-Auguste Hiolin au Musée de Soissons le 1er mars.

Louis-Auguste Hiolin est né en 1846 à Septmonts, est mort à Silly-la-Poterie près de La Ferté-Milon en 1910, et est enterré à Septmonts. La conférence de Pascal Ponsart-Ponsart présente sa vie, ses études, sa carrière, ses succès, ses contemporains.

Artisan compétent et appliqué, sa période de célébrité a été brève, et il tient peu de place dans l’histoire de l’art. Cependant, les habitants de Soissons et de ses alentours peuvent croiser ses œuvres tous les jours, sans pouvoir identifier leur auteur. Voici l’occasion de le connaître.

Auguste Hiolin avec la maquette de la statue de Jean Racine enfant

Devenu maçon comme son père à la carrière Lévêque sur les hauteurs de son village natal, il a montré des dons pour le travail de la pierre, a étudié aux Beaux-Arts, et a eu une carrière de « statuaire », c’est-à-dire de sculpteur de statues pour les monuments et bâtiments.

Il n’a pas connu la gloire des grands sculpteurs comme Rodin ou David d’Anger, qui ont atteint une vision plus profonde de leurs sujets ; l’œuvre de Hiolin serait, selon le conférencier, trop académique, trop « Troisième République » ; mais sa « sobriété austère » a été admirée, et il a été très sollicité.

Il a réalisé la statue de Jean Racine enfant au chevet de l’église de La Ferté-Milon, celle de Viollet-le-Duc habillé en Saint Jacques à l’entrée de la chapelle du château de Pierrefonds, et surtout les statues pour le monument de la Défense Nationale sur la place de la République à Soissons : la Génie de la Patrie en bronze au sommet, la figure allégorique de la Ville, et le Défenseur mourant en pierre.

Il était spécialiste de portraits sur médaillons, en a même réalisé un pour orner la tombe de son père à Septmonts. En s’y rendant, Pascal Ponsart-Ponsart s’est aperçu que le médaillon a disparu.

La conférence aidera à comprendre l’empreinte laissée par Hiolin sur la vie publique, de Soissons et ailleurs.


Louis-Auguste Hiolin, sculpteur soissonnais (1846-1910), conférence de Pascal Ponsart-Ponsart. 1er mars à 18h au Musée Saint-Léger. Renseignements et inscriptions : 03 23 59 91 20 ou musee@ville-soissons.fr

Pascal Ponsart-Ponsart, né à Charleville-Mézières, a été marionnettiste, formé au métier des « comédiens de chiffon » à Prague, avant de faire carrière dans la fonction publique à Paris, tout en gardant son intérêt pour le théâtre.
En achetant une maison de campagne dans l’Aisne en 1994, il a été sollicité par les habitants de son village pour les faire jouer. Le Petit Théâtre de Montgobert a été fondé en 2013. Il y est metteur en scène, acteur, et il a écrit plusieurs pièces, notamment pour une collaboration avec le musée Racine de La Ferté-Milon, dont il a été vice-président.
Depuis la retraite il vit à Saint-Pierre-Aigle, où il prépare à présent deux livres d’histoire locale.

[Une version abrégée de cet article paraît dans le Vase Communicant n° 350.]

Continuer la lecture

Histoire

Des hirondelles en héritage

Publié

le

L'art de l'amour céramique

C’est l’été. Dans la pénombre d’une cuisine, tous stores tirés contre la canicule de midi, les yeux panoramiquent, sortant un objet quotidien de son invisibilité habituelle.

Deux hirondelles tournent l’une autour de l’autre dans le ciel, au-dessus d’un jardin clôturé par des panneaux diaprés posés en quinconce. Au bord d’un lac un grand saule se penche sur l’eau, dominant des arbustes et arbres à feuillage ou fruitiers qui entourent un pavillon pagodal. Un batelier fait avancer un bateau à la godille ; trois sages défilent sur un pont en dos d’âne à cinq arches. Mais sans mouvement : l’histoire qui anime les personnes, le bateau, l’eau, les feuilles et les oiseaux est immobilisée par l’absence de temps. Elle restera à jamais sans dénouement.

Tous les composants sont bleus, imprimés sur le fond blanc d’un plat en faïence ordinaire de Delft. Le plat, retraité des tables à manger et accroché au-dessus d’une fenêtre de cuisine, est immobilisé aussi, comme le conte qu’il porte.

Il est marqué par les cicatrices de son métier de porteur de mets brûlants. N’étant pas en porcelaine dure, la surface s’est craquelée. Deux fissures noires s’étendent du bord ovale vers le creux du plat. L’une a été réparée par un pontage, dont les deux plots de plomb sont visibles.

Le dessin est traditionnel, et s’appelle « au motif de saule ». Cette chinoiserie willow-pattern a été conçue en Angleterre au 18e siècle par Thomas Minton, à partir d’éléments trouvés sur des assiettes importées de Chine.

Le succès du dessin a été tel qu’il a fallu inventer et diffuser une histoire pour le justifier. Pour résumer, la fille d’un mandarin aime un pauvre comptable, alors qu’elle doit épouser un puissant seigneur. Les amants s’échappent, mais les soldats du seigneur les retrouvent et les tuent. Les dieux, émus par leur amour, les transforment en hirondelles.

Quand j’étais enfant en Irlande, ma mère servait la dinde de Noël dans ce plat. Elle l’avait reçu de sa mère, je l’ai récupéré dans ses affaires.

Mais il peut venir de plus loin. La grand-mère ne l’aurait-elle pas hérité de sa mère ? La question reflète la connaissance fragmentaire de l’ascendance maternelle. Je n’en connais que des bribes, racontées par les aïeux ou recueillies dans un effort passager d’établir une généalogie. Ces informations et souvenirs contiennent des anomalies – dont je ne me suis aperçu qu’en les regardant ici par la loupe de l’écriture.

Ma grand-mère Isabella est née à Glasgow en Ecosse, d’un père irlandais, William Halliday, et d’une mère écossaise (comme son nom, Catherine Kincade, laisse supposer). Selon une de mes tantes, ils s’étaient rencontrés à une pendaison publique à Glasgow. Fait banal à l’époque, tout au plus insolite, elle introduit un élément funeste dans l’histoire familiale.

William faisait-il, comme il a été dit, partie du contingent de saisonniers irlandais en Ecosse ? En ce temps-là les liaisons maritimes étaient beaucoup plus commodes que le maigre réseau de routes rudimentaires, ce qui explique le tissage de liens denses entre l’Irlande du Nord et la Basse Ecosse toute proche.

Mais William était serrurier. Que faisait-il en Ecosse ? Combien de temps y est-il resté ? Ma grand-mère avait l’accent de Belfast, ne nous parlait jamais de Glasgow.

Voilà un lignage qui a plus de lacunes que de faits. Le plat de faïence accompagne (s’il ne précède pas) cet itinéraire troué. Si seulement j’avais interrogé mes aïeux… voilà le reproche que se font les gens en première ligne des générations, quand la conversation se tourne vers le passé familial. Les vieux racontaient, nous n’écoutions que distraitement, trop pris par notre avenir pour nous intéresser au passé des autres.

Et pourtant, je m’en trouve bien. Les familles éminentes et à biens tiennent la chronique de leur histoire, lestée par les titres et le patrimoine à transmettre. J’aime mieux ces points de lumière incertaine dans la nuit du passé qu’un soleil aveuglant qui expose chaque détail. Un mystère historique précède chaque vie, avec quelques indices. J’émerge du mystère, me laisse intriguer par les indices, mais sans consultation systématique d’archives, de registres paroissiaux, d’inscriptions.

Je pourrais écrire sur une étiquette les fragments d’information que je possède sur le plat bleu-blanc et la coller derrière à l’intention des générations à venir. Je ne le ferai pas. Orné ou pas de vagues souvenirs il avancera tel qu’il est, avec son lac, sa pagode, sa clôture diaprée, son saule, ses deux hirondelles qui tournent, et tournent, l’une autour de l’autre.

[Contact : denis.mahaffey@levase.fr]

Continuer la lecture

Ecriture

Denis Lefèvre, mémorialiste du monde paysan

Publié

le

L’auteur devant ses livres et ses objets à Breny.

L'art de raconter 14 000 ans d'histoire

“Soulever, pénétrer, déchirer la terre, écrit la romancière Colette, est un
labeur – un plaisir – qui ne va pas sans exaltation.” Racines et gènes

Racines et gènes, l’histoire de l’agriculture à travers le monde, commence par le récit d’une balade de l’auteur Denis Lefèvre avec son père autour de Breny, le village du sud de l’Aisne où il a grandi et qu’il habite encore, à quelques pas de la ferme de ses parents. Ils sont entourés des traces de l’évolution du monde rural qui sera abordée dans les 1152 pages suivantes.

Denis Lefèvre vit dans une maison en bois qui ne se remarque guère parmi les constructions traditionnelles de pierre, sauf que l’intérieur a des allures de chalet de montagne. Des livres remplissent les étagères, rangés par catégorie (paysannerie, écologie, Europe, Emmaüs, altermondialisme… et ses propres ouvrages) et avoisinent des objets accumulés en voyage, dont des jouets en bois. Il n’est pas collectionneur mais ramasseur, comme un enfant qui cherche des cailloux remarquables sur la plage. Pour rester dans le cadre agricole : il ne cultive pas, il cueille. Nous y parlons de son dernier livre.

Son histoire de l’agriculture débute il y a 14 millénaires en Galilée, quand la communauté des Natoufiens quitte ses grottes pour des villages. C’est le début de la « révolution néolithique » et, vu ses conséquences, de la civilisation. La culture des céréales a été à l’origine du commerce, de la mathématique, de l’écriture, et même de la religion : semer est un acte de foi.

Racines et gènes est volumineux. Mais il n’écrase pas le lecteur. Le ton est souple, l’expression éloquente, imagée. Il en fait une histoire saisissante, comme celles qui se racontaient dans les veillées. Plus qu’un long discours sur l’agriculture depuis ses débuts dans le Croissant Fertile, son livre est un éperon pour faire comprendre le monde paysan, ses origines, sa floraison, son déclin. Denis Lefèvre est à la fois savant et divertissant. Il se dit « éternel étudiant » mais c’est aussi un enseignant talentueux, transmettant son savoir avec engouement et humour. Ses informations peuvent être inattendues : des trois céréales de base, le blé, le maïs et le riz, seul ce dernier exige des infrastructures ; la Grande Muraille a-t-elle été construite pour protéger les rizières chinoises ?

Racines et gènes est une histoire, pas une étude. L’auteur entre dans le détail des transformations techniques et mondialistes, mais sans avoir recours à un seul tableau, camembert ou graphique.

Il admet avoir mis vingt ans à écrire son magnum opus. «J’ai obtenu une aide du Centre national du livre, qui m’a permis de passer trois mois par an sur le projet.» En parallèle il a publié de nombreux ouvrages sur le monde rural, mais aussi sur l’abbé Pierre et Emmaüs.

L’agriculture a initié un développement social, technique, financier sur le dos des paysans, toujours déconsidérés par ceux qui se sont nourris et enrichis du produit de leur labeur. Denis Lefèvre se fait mémorialiste de leur émergence, longue primauté et, depuis cent ans, rapide déclin devant la sur-technologisation. Mais il ne râle pas, il constate froidement. De ses parents il écrit «Nés paysans, ils sont devenus agriculteurs.»  Tout est dit.

C’est l’histoire. Et l’avenir ? Il relève les mêmes phénomènes qui ont déclenché la révolution néolithique, réchauffement climatique, pénurie d’eau, nomadisme (urbanisation, migration), accroissement de la population. Quelle révolution nous attend ?  

Racines et gènes, 2 volumes, Ecopoche 2018.


DM ajoute :  J’ai rencontré Denis Lefèvre pour la première fois en 2005 à une réunion du Comité de Jumelage des cantons français d’Oulchy-le-Château et allemand de Grasleben, dont il était président. L’année d’après, pour la rubrique Chemins de l’Engagement que je tenais dans le journal L’Union, il s’est confié sur sa voie dans la vie. Quinze ans et de nombreux livres plus tard, ses engagements, ses valeurs, ses combats gardent toute leur force. Voici l’article.

Ecrivain et paysan dans l’âme

A six ans, Denis Lefèvre était fasciné par Joseph Kessel et Albert Londres à la radio, et disait «Un jour je serai grand reporter comme eux.» Il ne l’est pas devenu, mais la force de cette vision l’a guidé dans ses choix pour devenir écrivain.

Né en 1955, il grandit sur une ferme à Breny, près d’Oulchy-le-Château. De son milieu catholique il dit avoir gardé une confiance « un peu boy scout » en la gentillesse des gens, qui l’a mal préparé pour le rude monde de l’édition.

Après son bac, il entre dans une école supérieure d’agriculture à Paris, et commence une carrière d’agronome, jusqu’à s’occuper de l’élevage à la Chambre d’agriculture de l’Aisne. Devenu écrivain nécessairement seul, il garde un bon souvenir des relations de travail.

L’idée du journalisme le reprend. Après une école de communication à Angers, il envoie son CV partout. Il remplace une journaliste de La Croix partie en congé de maternité, puis devient rédacteur en chef d’une revue des industries agroalimentaires, et de Agriculture magazine.

Il veut écrire un livre, et devient pigiste pour en avoir le temps. Le retour des paysans, qui reçoit un accueil dithyrambique, démontre que l’agriculture, même si elle est marginale, pose toutes les grandes questions de société. Suivent une dizaine de livres, dont une histoire des communautés d’Emmaüs. Son dernier projet, « Des racines et des gènes », est une somme de ses recherches, allant du néolithique, époque du début des civilisations, des guerres et des inégalités, à la mondialisation et le réchauffement planétaire. «Je suis paysan dans l’âme» : il explique ainsi ses préoccupations.

Depuis un stage à Bruxelles, son autre passion est l’Europe : «un empire qui se crée sans faire la guerre». En 1981 il établit un jumelage entre le canton d’Oulchy et un canton allemand, avec une idée simple : faire se rencontrer les citoyens de deux pays.

Sa conversation reflète sa démarche de journaliste, qui enquête plutôt que de redire des informations déjà formatées. Il se considère journaliste, pas écrivain. «Je m’occupe des faits, non pas d’imagination.» En doutant constamment de la valeur de ce qu’il produit, il évite l’écriture routinière, protège sa voix d’auteur.

Denis Lefèvre habite une maison tout en bois, derrière la ferme familiale à Breny. Il vit seul. Ce n’est pas un choix, dit-il. L’écriture est un travail solitaire, qui tend à isoler un auteur. Les éditeurs ne choient que les écrivains vedettes, et comment entretenir une famille avec de maigres droits d’auteur ?

«Je vois mal l’avenir» admet-il, déçu par la dérive des idéaux fondateurs de l’Europe, et troublé par une mondialisation «qui a tout cassé». Au moins, il admet «qu’un livre est comme un grand reportage». Modifié par la réalité, voilà le rêve qui se réalise.


[Mémorialiste du monde paysan paraît dans le Vase Communicant n°307.]

Continuer la lecture
P U B L I C I T É

Inscription newsletter

Catégories

Facebook

Top du Vase

LE VASE sur votre mobile ?

Installer
×