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Le Vase des Arts

La chamade

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L'art de réfléchir Bach

Thomas Ehnco, piano, et Vassilena Serafimova, marimba, Cité de la Musique de Soissons, 3 mai 2022

Le récital commence doucement, mélodieusement, par des réminiscences d’une sonate pour orgue de Bach, filtrée par un piano de jazz et un marimba (grand xylophone muni de résonateurs). C’est Miroirs, une composition de Vassilena Serafimova. Une soirée enlevée en perspective, alors, pleine de trouvailles ingénieuses dans une ambiance d’improvisation ?

Vient ensuite Fire Dance de Thomas Ehnco, « avec des citations de la cantate Jésus que ma joie demeure ». Le ton, la vivacité sont les mêmes. Mais à mi-chemin les mains de Vassilena, chacune tenant deux baguettes, cessent de voler au dessus des lames du clavier ; elle lève les deux mains, attend, frappe fort et entonne lentement le thème de la cantate. L’effet est électrisant. Les notes, pourtant simples comme un air inventé par un enfant, sont si éloquentes, portent une telle charge, aussi émotionnelle que spirituelle, que le cœur de bien d’autres auditeurs dans la salle a dû battre la chamade.

Les deux musiciens sont connus à Soissons, mais séparément. Encouragés par Gisèle Magnan des Concerts de Poche, ils sont revenus ensemble, faire entendre le résultat de trois ans de travail en commun, l’album Bach Mirror. Au programme de la soirée treize brèves œuvres, composées soit par Bach et transcrites par l’un ou l’autre, soit par eux-mêmes mais, comme c’est noté scrupuleusement, « inspiré » chacune par une composition de Bach.

Le résultat est un concert joyeux, enthousiasmant, musicalement impressionnant. Thomas Ehnco possède une technique brillante, une capacité de séparation du jeu des deux mains, comme s’il jouait en duo avec lui-même. Le jeu de Vassilena Serafimova, avec ses quatre baguettes dansantes, est visuellement spectaculaire, et le son du marimba, le claquement sur les lames de bois amplifié par les résonateurs suspendus  sous le clavier, fait parfois l’effet d’un piano fantomatique qui ajoute une dimension au piano classique.

Après Bach

Pour terminer la soirée, les deux musiciens ont joué, sans fioriture, leur transcription de cet autre thème iconique d’une autre cantate, Le troupeau peut paître sans danger, encore une mélodie simple, sublime.

Bach le miroir ? Le duo a poursuivi son travail sur l’album pendant la période des confinements et, pour Thomas Ehnco en ces temps troubles, « Bach, c’était une sorte de remède au doute. » Et si, en adaptant et brodant sur sa musique, Thomas Ehnco et Vassilena Serafimova cherchaient à mieux s’y voir, dans le miroir Bach ? Et si, en jouant leurs adaptations et compositions, ils permettaient aux auditeurs à mieux s’y voir aussi ?

Commentaires : denis.mahaffey@levase.fr

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