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Théâtre

Free jazz sur le thème du cirque

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L'art du cirque alternatif

Roulements de tambour, clowns aux seaux d’eau, acrobates qui volent d’épaules en épaules, éléphants à la queue-leu-leu, fauves s’énervant contre la chaise du dompteur, magiciens qui coupent la femme en tranches : le cirque a des trésors d’esbroufe, de fausses peurs (les trapézistes ne chutent jamais que dans les films sur le cirque), couleurs chatoyantes et pailletées, le tout à vive allure devant des tentures et fauteuils de velours rouge. En boucher un coin aux spectateurs est ce qui compte.

Les artistes du Cirque Bouffon lisent le journal.

Ces conventions peuvent sembler inébranlables, s’imposant à tout spectacle de cirque. Pourtant deux troupes venues au théâtre du Mail prennent des libertés avec cet amoncellement de traditions. En novembre, le Casus Circus a présenté « Driftwood », où les acrobaties de quatre Australiens représentaient une recherche de relations et une expression d’amitié. Arborant de petits ou grands sourires, ils accomplissaient des exploits corporels comme si c’était la chose la plus simple du monde.

Ils sont suivis au Mail par le Cirque Bouffon avec « Solvo », sa troisième production. En latin « solvo » signifie « je libère », et ce spectacle peut être vu comme une tentative de défaire le cirque de ses clichés, tout en retenant son absence de cohérence rationnelle, c’est-à-dire son enchantement.

Le spectacle commence, comme il se terminera, dans un amas de papier journal écrasé (le metteur en scène Frédéric Zipperlin, avec un sens de l’ancrage local, se sert de feuilles de « l’Union »). Assis en haut du tas le clown de la troupe, Gregor Vollny, en costume noir de fonctionnaire, mais avec un chapeau (noir) de schtroumpf, lit et jette page après page par terre. Quitterions-nous ainsi l’actualité, pour entrer dans l’intemporalité ?

Il y a peu de « numéros ». Le talent des artistes s’exprime plutôt dans des gestes, des mouvements, des acrobaties, fondus dans une succession d’incidents qui est comme une histoire sans queue ni tête : il s’agit de séduire et dérouter les spectateurs, plutôt que de les époustoufler.

Gregor Vollmy prépare son coup sans être sûr du résultat.

Gregor Vollny exécute une série de tours de magie et de prestidigitation dont les ficelles sont plus grosses que l’illusion qu’il veut créer. Ses mimiques font penser au Mister Bean de Rowan Atkinson, en assortissant ses actions à une emphase débordante.

La musique est un élément important, dans des tonalités mineures qui nous transportent vers l’Europe centrale. Là aussi « Solvo » se joue de l’idée d’une partition exécutée par un orchestre dans une fosse. Les musiciens sont sur scène, ils entrent et sortent, jouent ensemble ou seuls. Dans une scène, le contrebassiste est rejoint par les autres, chacun y allant de son archet sur le même instrument.

Il y aurait une intrigue, mais elle nous incite à la suivre sans chercher à y trouver une progression logique. Le spectacle fait penser à une sorte de free jazz qui prendrait pour thème le cirque dans sa forme conventionnelle, comme s’il partait d’une mélodie archi-connue pour en explorer les variations musicales.

denis.mahaffey@levase.fr

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