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Théâtre

La Dispute : une antepenultième au Mail

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L'art de Marivaux

Les quatre jeunes en attente

Les quatre jeunes en attente

« C’est la première mise en scène que j’ai faite en arrivant en Picardie il y a treize ans » dit Vincent Dussart de la compagnie l’Arcade, parlant de « La dispute » de Marivaux. La pièce avait été présentée à nouveau Il y a six ans dans une mise en scène retravaillée, pendant la première résidence Arcade au théâtre du Mail.

La compagnie vient de la rejouer au Mail dans le cadre d’« (In)visibles », projet lancé dans des classes de Première au printemps, et poursuivi avec les mêmes élèves mais en Terminale, dans quatre lycées de Soissons : Vinci, Nerval, Claudel et Le Corbusier. Ce projet utilise le théâtre pour lancer un débat sur l’identité face aux autres, en posant des questions telles que « Est-ce j’existe sans le regard des autres ? ».

Dans « La dispute », sa dernière pièce, de Marivaux examine l’identité dans une situation où elle se pose le plus crûment. Quatre jeunes, isolés depuis le berceau, sont libérés devant leur Prince, pour découvrir lequel, un homme ou une femme, sera le premier infidèle. Mais pour Vincent Dussart ils se trouvent face à une question plus existentielle : comment fera celui qui n’a jamais connu que lui-même, et qui doit se situer par rapport à « l’autre » ?

« Les acteurs adoptent un double langage théâtral pour le faire. Les répliques ciselées de Marivaux portent l’intrigue. Simultanément, le corps s’exprime : chacun a son mouvement pour « je », et adopte le mouvement de l’autre pour dire « vous ». Le plus comique, le plus émouvant, est lorsque deux corps se rejoignent en combinant les mouvements pour le « nous ».(*) Ils combattent leur vide en utilisant les autres pour vivre.

Metteur en scène et comédiens au bord de la scène

Metteur en scène et comédiens au bord de la scène

Quand l’expérience est terminée, le serviteur du Prince abat les quatre jeunes comme des rats de laboratoire qui auraient prouvé un point scientifique.

Dans le « bord de scène » après le spectacle, metteur en scène et comédiens ont répondu aux questions, souvent percutantes, sur la pièce et le dilemme qu’elle évoque. Vincent Dussart a montré une belle précision en annonçant qu’après ces treize ans la production prendra bientôt fin : « C’est l’antepenultième représentation ce soir ». C’est-à-dire qu’il reste encore la pénultième et la dernière, qui auront lieu à Saint-Quentin.

Ceux qui avaient déjà vu la production auront perçu une force incisive renouvelée chez les acteurs, dont tous sauf un avaient tenu les rôles en 2010. Est-ce parce qu’ils ont eu le temps d’approfondir leur propre réponse à la question de l’existence face au monde extérieur. Le théâtre aide non pas a vivre, mais à se regarder vivre.

A la fin le public, dont une grande majorité de jeunes, a réagi avec des rugissements dignes d’un match de foot, bruit exceptionnel dans une salle de théâtre après une heure de Marivaux. On pouvait ainsi mesurer l’impact du travail accompli en classe par les comédiens et les élèves. L’Arcade avait marqué un but.

* Voir la critique de 2010.

denis.mahaffey@levase.fr

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