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Théâtre

La Guerre se lit

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L'art de la lecture

Les acteurs au Fort de Condé

Les lecteurs au Fort de Condé                                        (photo M. Besset)

Le sous-lieutenant allemand Christian Tramsen écrit à sa mère de Péronne en ruines en 1916. Il a dix-neuf ans. Il vit dans une cave, compte réquisitionner un livre de La Fontaine pour rafraîchir son français.

Le Corse Jacques Ambrosini décrit longuement à son frère la bataille contre les Turcs dans les Dardanelles. Blessé, il marche les bottes pleines de sang.

Wilbert Spencer, officier anglais de mère allemande, lui raconte la trêve de Noël 1914, ce moment où la guerre s’est buté au sentiment de fraternité entre les adversaires.

Le jeune Matthias lit une lettre de sa mère bavaroise. Face aux protestations civiles, les militaires prussiens ont dit aux mères de famille « qu’elles devraient mener leurs enfants dans les champs et qu’ils y mangent l’herbe ».

L’Ecossais James Milne gribouille une lettre d’adieu à sa femme avant l’attaque. Il la gardera dans sa poche, dans l’espoir qu’une bonne âme la lui fera parvenir.

Henri Floch, soldat français, s’adresse une dernière fois à sa femme. Il va se confesser, puis sera fusillé pour abandon de poste. « Je meurs innocent du crime qui m’est reproché. »

Ces lettres, parmi la vingtaine qui composent « Lettres de Guerre/Letters from the war/Feldpostbriefe », une production de la compagnie L’Art et la Manière, disent la vie pendant la Grande guerre 1914-18.

Ce qui frappe l’auditeur est que ceux qui doivent s’entretuer ne montrent que passagèrement leur hostilité envers leurs adversaires des tranchées en face. Le vécu des militaires de chaque côté exprime la souffrance physique et morale, la peur, la révolte, les traumatismes, mais aussi la foi, la bravoure, l’humour qu’ils ont en commun. Ils écrivent à ceux qu’ils ont laissés « à la maison » des lettres d’amour, exacerbée par la perspective de ne pas les revoir.

C’est Jacques Delorme, metteur en scène de la compagnie, qui a conçu cette approche englobant alliés et ennemis dans la même peine. Il a recruté trois lecteurs, Nicolas Pierson, professeur de collège et lycée, pour les lettres en français, Arnaud Duminil, germaniste qui a enseigné l’allemand au collège, pour traduire et lire les lettres en allemand, et Denis Mahaffey pour traduire et lire les lettres en anglais.

Au "Café Marcey" de Pargny-Filain le 11 novembre.

Au “Café Marcey” de Pargny-Filain le 11 novembre                   (photo  M. Besset)

Les trois lecteurs ont cherché et sélectionné eux-mêmes ces lettres, dont les auteurs sont aussi bien français et britanniques qu’allemands et autrichiens, irlandais, américains. La mise en scène de Jacques Delorme crée un cadre presque chorégraphique, dans lequel les textes s’entrechoquent ou s’éclairent, et où les trois acteurs sont intensément complices et attentifs entre eux.

« Lettres de guerre » a été présenté aux « décideurs » qui programment les manifestations du Centenaire, élus locaux, représentants de communautés de communes et de la Ligue de l’enseignement, au Fort de Condé. Divers contacts ont été pris, des propositions sont en cours, des dates sont prévues, surtout pour l’année 1917, centenaire de l’année la plus terrible de la Guerre.

Un extrait du spectacle a été donné au cours de la journée organisée par la commune de Pargny-Filain à l’occasion du 11 novembre.

L’Art et la Manière, tél. 06 82 23 87 74

denis.mahaffey@levase.fr

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