Connectez-vous avec le Vase

Théâtre

Les Misérables de bric et de broc

Publié

le

L'art de jouer Hugo

Les drapeaux de la Révolution sont levés.

Le public du Mail a appris à apprécier reconnaître le regard en coin des Belges sur la vie, ses drames et ses absurdités. De conférences bidon en humour potache exploitant le riche filon des sousvêts d’homme, ils prennent tout au sérieux, pour mieux dérouter des spectateurs, ou se moquent de tout pour en dégager le sérieux.

Karine Birgé et Naïma Triboulet regardent Jean Valjean se diriger vers l’église.

Marie Delhaye et Karine Birgé, qui ont créé la compagnie des Karyatides à Liège il y a une vingtaine d’années, aiment diriger leur regard sur les grands monuments de la littérature de leurs voisins au Sud. Au lieu d’employer des acteurs célèbres qui joueraient dans des décors somptueux, elles en font du théâtre d’objets. Pour Les Misérables de Hugo, ces objets, notamment ceux qui représentent les multiples personnages, de Jean Valjean à Cosette, mais aussi la foule des révolutionnaires, sont si hétéroclites qu’il s’agit de toute évidence d’une décision des créateurs. Les personnages sont des santons, des poupées, modelés en plâtre ou sculptés en bois, de tous les styles et de toutes les tailles. Le décor est fait de maquettes de petites maisons, d’une église, mais aussi de boîtes métalliques qui s’ouvrent pour découvrir un intérieur et d’autres accessoires. Les deux marionnettistes, Karine Birgé et Naïma Triboulet, toujours visibles, les manipulent, prononcent les dialogues, se joignent aux mouvements.

L’effet visuel est souvent cocasse. Paris est représenté par une tour Eiffel posée un instant sur la table. Le plateau de la table peut tourner à l’horizontale ou en tambour, selon l’action, pour représenter, par exemple, une course poursuite.

Une production de Les Misérables faite de bric et de broc, alors. Pour tourner l’histoire monumentale en dérision ? Pas du tout. En éliminant tout ce qui pourrait donner du réalisme au spectacle, l’équipe des Karyatides prouvent que l’émotion, le souffle, le pathos, l’indignation du roman dépendent, non pas de la reproduction de l’histoire sur scène, mais de l’illusion que crée le théâtre. L’imagination du spectateur n’a besoin que d’être stimulée pour qu’il soit ému et enthousiasmé. L’irréalisme ne fait que dégager l’imagination de tout ce qui serait contingent.

Il y a un autre facteur. En 2013, quand pour VO en Soissonais Marie Delhaye a joué l’histoire de Madame Bovary, en utilisant quelques bouts de papier découpés, le compte rendu se terminait ainsi : « Le spectacle donne une furieuse envie de revenir au livre. Les marionnettes titillent l’imagination, et la lecture lui permettra de se déployer pleinement. »

Continuer la lecture
P U B L I C I T É

Inscription newsletter

Catégories

Facebook

LE VASE sur votre mobile ?

Installer
×