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Théâtre

Philippe Caubère : égocentrique dans le bon sens

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L'art du théâtre

Caubère

Il était interdit à la presse de prendre des photos, même sans flash ni bruit ni voyant de mise au point. En remplacement, une esquisse de Philippe Caubère portant le plaid de sa mère.

« La danse du diable » de Philippe Caubère au Mail le 6 mars, pour le Printemps des conteurs.

Habituellement, il faut voyager pour visiter un monument historique : Paris, Rome, Macchu Pichu… Seuls quelques spectacles mythiques ont le statut de monument ambulant. Alors quand l’un d’eux, « La danse du diable » de Philippe Caubère, se déplace à Soissons, il faut saisir l’occasion.

Il a créé la pièce en 1981, première d’une longue série de spectacles dans lesquels, seul en scène, il s’explore à travers le personnage fictif de Ferdinand Faure. Il l’a reprise et remaniée en 2000, et à nouveau en 2014.

Comment décrire un tel spectacle ? Il y a la forme, puis le fond.

Imaginez un oncle jovial qui, après un déjeuner de dimanche avec toute la famille, aurait un peu forcé sur le Grand Marnier, et serait parti dans ses histoires, mimiques, imitations, extravagances et révélations, riant, pleurant, ne s’arrêtant que quand il s’aperçoit que personne n’écoute plus, que certains sont déjà partis chez eux.

Philippe Caubère arrive à garder la démesure d’une telle auto-gratification ; la différence est que son texte est d’une grande rigueur, précis, éloquent, avec un sens aigu des registres comique et pathétique.

Il fait jouer des personnages historiques, sur le ton de la dérision. Il n’est pas imitateur : il choisit un ou deux traits qui fixent la personne, la résonance des voyelles de De Gaulle ou les tics manuels de Malraux. Sartre devient « le crapaud » pour les autres, et en pleure. Une femme « arianesque » hurle sa ferveur pour le théâtre, poussant un comédien à franchir les limites jusqu’à cracher sur le public (en vrai !).

Surtout, un simple châle sur les épaules, Caubère joue sa mère marseillaise, saugrenue, capricieuse, autoritaire. Nous avons entendu en direct la réplique légendaire, parmi d’autres, où elle évoque « ce Russe avec une barbe qui a passé sa vie au goulash ».

La salle rit beaucoup, et à juste titre. Cependant, Caubère n’est pas un comique, c’est un comédien, et jamais il ne s’arrange pour susciter des rires qu’il chevaucherait pour les prolonger.

A l’entracte, après deux heures et avant une troisième, une spectatrice trouve que « ça tourne en rond, c’est égocentrique ». Pour égocentrique, en effet, c’est égocentrique : Caubère se découvre, pour lui-même à l’écriture, puis pour le public en salle. Un livre de Michel Cardoze s’intitule « Philippe Caubère joue sa vie ».

denis.mahaffey@gmail.com

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