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Musique

L’accordéoniste, le guitariste et le jazz

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L'art de l'accordéon - et de la guitare basse

Philip Catherine et Richard Galmliano à la CMD

L’accordéon souffre de sa réputation « populiste » (le mot est de Richard Galliano parlant de son ancienne réticence envers l’instrument qui l’a rendu célèbre). Il sert trop souvent à jouer la musique la plus facile à écouter, comme celle qu’on peut entendre dans les ascenseurs ou les boutiques. L’étiquette « bal musette » lui a fait du tort. Il donne de l’entrain à une fête, mais les musiciens sérieux le regardent de travers.

Richard Galliano l’a quand même adopté, s’en servant pour jouer toutes les musiques, les classiques comme le jazz. Il en a exploré toutes les possibilités, lui a en quelque sorte donné ses titres de noblesse.

Il est venu à la CMD avec le guitariste belge Philip Catherine, célèbre lui aussi. Ces deux hommes d’âge plus que mûr n’ont pas perdu leur fougue, leur jeunesse musicale, mais ils jouent avec une profondeur, une capacité à susciter l’émotion et une hardiesse qui reflètent une longue pratique de la vie.

Ils ont joué surtout leurs propres compositions. Chaque fois, c’était une vibrante illustration de ce qu’est le jazz moderne : un thème éloquent qui part ensuite sur un chemin qui le fait découvrir, l’éclaire, le fait écouter autrement. Richard Galliano exploite des ressources peu familières de l’accordéon avec des rafales de notes qui font monter la tension (bienfaisante) dans la salle. Philip Catherine joue sa guitare en insistant sur la mélodie, en exprimant des sentiments intenses, comme s’il jouait des ballades.

Avant le concert, l’accordéon de Richard Galliano l’attend sur scène.

Le contrebassiste Philippe Aerts et le batteur Hans van Oosterhout complètent le « New Musette Quartet ». C’est du jazz moderne sans intellectualisation ni paroxysme (même le batteur est resté dans la discrétion, créant une sorte de vent sonore pour accompagner les solistes).

Une fois ses trois partenaires ont quitté la scène, et Richard Galliano a offert un exemple extraordinaire de ce qui pourrait s’appeler du jazz baroque, presque du Bach dans sa construction et ses phrasés.

L’interprétation de « My funny valentine » a illustré parfaitement le style du quartet. Richard Galliano l’a jouée sur un « accordina », petit accordéon « de bouche », dans lequel le mouvement du soufflet est remplacé par le souffle de l’instrumentiste. Il a commencé par un passage où n’émergeaient que de brefs échos de la chanson, puis l’a élaboré. La guitare est intervenu à son tour, en jouant intégralement la mélodie sans rien y ajouter, puis est passée à une vision personnelle de ce qu’avait écrit le compositeur.

Le New Musette Quartet

Avant de jouer « Fou rire », Richard Galliano a raconté ses origines. Le morceau a été inspiré par l’hilarité qui a conclu une « master class » qu’il avait donnée il y a longtemps à Soissons, et dont une des élèves était Alexandra Paris, devenue depuis célèbre elle aussi.

A la fin du concert, Richard Galliano a fait un clin d’œil à la tradition musette en jouant, avec un doigt et sans aucun embellissement, les notes de « La Javanaise », reprise aussitôt par la salle.

On a appelé l’accordéon le « piano à bretelles » pour s’en moquer. Cependant, ses sonorités sont davantage celles d’un orgue. Après un tel concert, accueilli chaleureusement par les auditeurs, il serait tentant de parler de « grandes orgues à bretelles ».

denis.mahaffey@levase.fr

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