La forêt de Retz est-elle exceptionnelle ?
C’est la question qui est posée alors que le comité de pilotage se forme pour porter la forêt de Retz à la candidature de « Forêt d’exception ». Des voix s’élèvent en effet contre sa gestion, c’est le cas par exemple de Vincent Savoldi qui se définit comme simple citoyen en colère : « Comment peut-on parler de forêt d’exception quand on observe sa destruction depuis 10 ans par l’ONF et le secteur privé ? » demande-t-il. Il ne mâche pas ses mots : « L’abattage massif continue, le seul label auquel elle pourrait prétendre aujourd’hui est celui de clairière d’exception. »
Pour Joël Linte, responsable à l’ONF de l’unité territoriale de Villers-Cotterêts : « L’exploitation est conforme à la production de bois d’une forêt publique. 100 000 à 110 000 m3 de bois sont récoltés par an, soit 8,5 m3 par hectare et par an, ce qui ne correspond même pas à l’exploitation totale qu’il serait possible de faire. » Joël Linte confirme toutefois que « la forêt a connu des coupes plus importantes entre 2000 et 2010, mais aujourd’hui le renouvellement de la forêt est contrôlé et se fait en continu. Il est vrai que les coupes de régénération avec de jeunes arbres créent un changement brutal de paysage dans cette forêt de hêtres qui vivent 100 à 120 ans. C’est aussi une régénération plus rapide qu’une forêt de chênes qui vivent 180 ans. »
S’il y a un changement brutal dans le paysage aujourd’hui, le responsable de l’ONF l’explique avant tout par le réchauffement climatique : « Il est de notoriété publique maintenant que le climat fait dépérir les forêts du nord notamment et d’autant plus les forêts de hêtres comme ici qui sont très sensibles au changement climatique, c’est le cas aussi pour les épicéas qui contractent des maladies. Nous n’avons plus le choix, il faut vite procéder à des coupes sinon nous aurons une forêt d’arbres morts, ce qui de fait provoque une exploitation plus importante. Pour autant nous continuons de replanter mais avec d’autres essences plus adaptées, comme le chêne de Hongrie par exemple. »
Investi dans sa démarche, Vincent Savoldi confie également qu’il a interpelé il y a quelques années Delphine Batho, ancienne ministre de l’Ecologie. Celle-ci lui a répondu : « La loi Borloo du grenelle de l’Environnement permet au secteur forestier de prélever 10 % de la forêt française par année ». Réponse qui lui fait dire : « Le constat est clair, c’est une destruction massive et le motif est sûrement le profit. »
Elise Michaud, chargée de communication à l’ONF des Hauts-de-France, précise alors : « Il faut bien comprendre que cette forêt a été l’une des premières à être plantée pour fournir du bois de construction au pays. Aujourd’hui, nous la gérons de manière durable afin qu’elle puisse à la fois se renouveler et fournir du bois à la société. Qu’en serait-il de la filière bois française ? Devrions-nous l’oublier et importer du bois de l’étranger ? Serait-ce d’ailleurs plus respectueux de l’environnement ? Tout l’intérêt d’une forêt publique comme la forêt de Retz est justement sa multifonctionnalité, cela permet de préserver la biodiversité, de multiples actions sont mises en place dans ce sens, tout en maintenant la filière bois française et l’aspect loisir pour le public. »
Elise Michaud assure : « Tour le travail de sylviculture réalisé ici permet d’avoir un beau bois d’exception. Il ne faut pas croire qu’il est surexploité, aucune forêt domaniale française n’est d’ailleurs surexploitée. »