En juillet 2006 j’ai rencontré Patrick Dupond, venu à Soissons pour animer un cours d’été de ballet classique dans l’école de danse de Leïla da Rocha. Monument de la danse diminué par un grave accident de la route et ses séquelles, il a néanmoins mené le groupe de jeunes filles dans leurs exercices. Surtout il leur a communiqué la magie de leur discipline, ses difficultés, ses exigences et, en retour, quand un pas est réussi, quand tout est comme il doit l’être, l’expérience de «moments d’éternité».
Les danseurs se regardent dans les glaces.
Il s’est ensuite installé à Soissons en partenariat avec Leïla da Rocha. Par rapport à sa carrière internationale fulgurante, à sa discipline d’acier, mais aussi à son impétuosité et aux écarts qui lui ont valu bien des ennuis, cette vie de maître à danser en province pouvait faire penser à un refuge tranquille.
En 2010 Patrick Dupond et Leïla da Rocha ont monté un spectacle dans le théâtre du Mail à Soissons. Fusion illustrait la rencontre, d’abord entre deux individus, puis entre deux cultures, européenne et orientale. Le contraste avec l’image du jeune Dupond danseur étoile de l’Opéra de Paris frappait une partie des spectateurs ; d’autres, dont beaucoup de jeunes filles, faisaient une ovation à l’image, qu’elles voyaient inaltérée sur scène.
En 2017, le couple Leïla da Rocha et Patrick Dupond est parti à Bordeaux pour ouvrir une nouvelle école de danse.
Ses années à Soissons, à l’école de danse et dans les rues de la ville, auront montré comment vit un homme qui a été couvert de gloire, quand les projecteurs qui l’ont suivi le quittent pour éclairer d’autres.
Avec Leïla da Rocha après Fusion
Les fleurs qu’il tient sur la photo prise après la Première de Fusion viennent d’une admiratrice japonaise, qui avait fait le déplacement pour voir son spectacle. L’ayant revu sur scène, elle n’a pas voulu le rencontrer pour offrir son bouquet. Je le lui ai donc donné en son nom, dans le foyer des artistes. Elle est restée en retrait. Plus tard, en recevant des photos de la soirée, elle a écrit de Tokyo : «Il dansait toujours avec l’âme nue».
[Deux articles dans l’Union rendent compte de son premier cours en été 2006 et de la création de Fusion en 2010.]