Des auditeurs fidèles du traditionnel concert de printemps du Cercle Musical ont pu se rappeler une époque où un tel événement ressemblait à un match de foot auquel le public assistait avec l’enthousiasme de supporters sportifs. La fin de chaque morceau faisait l’effet d’un but marqué : les supporters applaudissaient la musique qu’ils venaient de entendre, mais aussi l’exploit que leur équipe avaient réussi en la jouant.
Jane Astier et Alix Lecuyer
L’ambiance a changé avec le temps. Les musiciens, sous leur nouveau chef Martin Barral, par ailleurs professeur de violoncelle au Conservatoire de Soissons, font preuve d’une nouvelle confiance, dont les racines plongent bien sûr dans la longue histoire de l’association de musiciens amateurs, la plus ancienne de Soissons dans le domaine de la musique,. Les anciens, rejoints par des membres plus récents, abordent un répertoire plus aventureux – quoique l’audace qu’il a fallu pour former un orchestre d’amateurs ait toujours été une caractéristique du Cercle Musical.
L’ensemble qui a joué dans la salle de la Cité de la Musique dimanche après-midi a commencé inhabituellement avec une sonate de Haendel pour deux violoncelles et cordes. Les vents et cuivres attendaient dans les coulisses.
Les deux jeunes solistes Jane Astier et Alix Lecuyer se sont bien acquittés de leurs responsabilités, dont celle même de jouer entre l’orchestre derrière et le public devant. Leur interprétation a reflété leur jeunesse, et promet un avenir musical réussi. Martin Barral les a couvées du regard, comme une lionne ses lionceaux. Après les applaudissements, les deux violoncellistes ont rejoint l’orchestre, mais en gardant quelque chose du prestige d’avoir été solistes.
Ensuite, une composition de Martin Barral. La Corona symphonia, écrite pendant un confinement, et qui le reflète par ses tonalités sombres – jusqu’aux avant-dernières mesures. Le chef d’orchestre a alors sauté de son estrade comme un fugitif de justice, et a plongé vers un piano garé côté cour, s’est assis et, soliste accompagné par l’orchestre, a terminé la composition en ragtime. La mélancolie de l’époque Covid a été bannie dans une liberté regagnée.
Laure Schnapper, présidente de l’Institut Européen de la Musique Juive, présente la symphonie de Fernand Halphen.
Pour terminer, l’orchestre a abordé une œuvre peu connue, créée en 1917 pour marquer le centenaire de la mort en 1917 de son compositeur, Fernand Halphen, pendant la Guerre 14-18. Laure Schnapper, présidente de l’Institut européen des musiques juives, a présenté sa Symphonie en Ut mineur. « Agréable à écouter, je trouve ; j’espère que vous la trouverez agréable aussi » a-t-elle dit en conclusion. Tout à fait, a paru confirmer la réaction du public, qui a applaudi assez pour avoir droit, en bis, au final de la symphonie. Etait-ce un signe de l’évolution du Cercle Musical que le concert n’a pas conclu par la traditionnelle Marche de Radetzky de Strauss, sorte de clin d’œil à ses fidèles ?