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Musique

Didon et Enée : l’événement

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L'art de l'opéra baroque

Stefanie True est Belinda la servante.

Stefanie True est Belinda la servante.

Quelle meilleure astuce pour déstabiliser un inconditionnel de la musique Romantique que de lui faire entendre « Didon et Enée », l’opéra de Henry Purcell. Il s’étonnerait d’y retrouver la passion, le lyrisme, les rires et les larmes des grands opéras du 19e. Il verrait que ce qu’il prend pour la sècheresse de la musique Baroque est en réalité une retenue qui ne fait qu’intensifier les émotions. Le Baroque bride les excès pour les rendre plus poignants, le Romantisme leur laisse la bride sur le cou.

Le prince Enée fuit Troie détruite, avec la tâche de fonder une nouvelle Troie à Rome. Il rencontre Didon, reine de Carthage, ils s’aiment. Rappelé à son destin, il la quitte. La désespérée se tue.

Dans le poème de Virgile, c’est Jupiter qui somme Enée à partir. Nahum Tate, librettiste de Purcell, introduit des magiciennes malveillantes qui complotent pour tout détruire.

Parlant au concert de l’Atelier de musique ancienne une semaine avant, Jean-Michel Verneiges, directeur de l’Adama, avait prédit que la production de « Didon et Enée » à la CMD serait « un des événements de la saison ». Une semaine plus tard, l’orchestre baroque La Risonanza sous son chef Fabio Bonizzoni, le chœur Costanzo Porta et les sept solistes l’ont confirmé.

Michela Antenucci et Anna Bessi agissent en sorcières.

Michela Antenucci et Anna Bessi agissent en sorcières.

Pour accroître la tension normale devant une telle œuvre, elle allait être enregistrée pour rejoindre la discographie de La Risonanza. Nous étions appelés à faire attention aux bruits parasites, ne pas tousser… Imaginez seulement un portable qui aurait sonné !

C’était un concert, mais les solistes entraient en scène et sortaient, esquissaient des mouvements et gestes, adoptaient des expressions, réagissaient entre eux. Sans devenir une mise en scène, cela ajoutait un impact visuel à la musique.

Le résultat était-il parfait ? Plus que cela, il était humain. La voix ronde et pleine de Raffaella Milanesi, digne d’une reine, la droiture de Richard Helm, prince préférant le devoir à l’amour, les excès des magiciens, la diversité des rôles joués par le chœur, et la souplesse des cinq instrumentistes qui accompagnaient tout le monde, ont créé un monde que nous habitions le temps de cette histoire tragique. « When I am laid in earth », chant de mort de Didon, déchirant cri de désespoir, a en même temps apaisé les passions, les conflits, les manœuvres. C’est le propre du Baroque.

denis.mahaffey@levase.fr

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