En débutant dans la chanson il y a trente ans, Michel Armengot avait ajusté son nom de famille pour devenir Art Mengo, aux connotations de jazzman américain ; son passage au Mail a eu en effet une ambiance de concert de jazz. La sonorisation n’avait ni le volume ni les résonnements de celle installée pour Sinclair il y a trois semaines. Les auditeurs ont réagi par des applaudissements généreux, mais sans les cris que suscite le rock plus bruyant.
Sa voix est haut placée et ferme. Quand il chante son visage prend une expression préoccupée, presque grave, les sourcils foncés, ce qui correspond souvent à la densité des paroles. La première chanson du concert s’appelait « Big bang » et, a-t-il expliqué, reflétait son incapacité à regarder Paris comme avant les attentats récents :
Souvenir d’un big bang,
Je n’entends plus comme avant »
Entre les numéros Art Mengo s’adressait au public pour présenter le suivant, commenter le contexte de leur composition, offrir des remarques sur la situation dans le monde. C’est le revers de la médaille de sa musique, par le style décousu, inconséquent même, avec un humour pas toujours pertinent. Pourtant ces interventions sont les bienvenues, car elles servent à alléger l’intensité des chansons. Puis il s’assied au piano, ou reprend sa guitare et, avec les quatre musiciens qui l’accompagnent, replonge dans le chant, rendu d’autant plus fort par ces interludes parlés.
Art Mengo se situe souvent dans le registre rock, mais toujours adouci pour assurer que le sens passera. Le journaliste Serge Raffy le voit « papillonnant avec délicatesse sur les planètes blues, flamenco, rock, pop, tango, musique classique, sans s’attarder sur les étiquettes ».
denis.mahaffey@levase.fr