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Théâtre

La clef de la réussite

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L'art du théâtre politique

Ses élèves l'assiègent.

Ses élèves l’assiègent.

Myriam Boyer avait laissé au Mail une image de douleur, de survivante hantée, en jouant Madame Rosa dans « La vie devant soi » d’Emile Ajar en 2009. Elle est revenue avec « Chère Eléna » de Ludmilla Razoumovskaïa, dans un rôle d’enseignante soviétique blindée par des certitudes morales et politiques mais auxquelles elle ne croit plus guère. L’image est lourde, peu attachante, aux antipodes de la pauvre vieille Rosa.

Quatre de ses élèves arrivent chez elle pour fêter son anniversaire, mais en réalité pour obtenir d’elle la clef du tiroir où elle garde leurs copies d’examen, avec l’intention de les corriger eux-mêmes et ainsi « réussir » dans un monde ou l’individu va primer sur le collectif. La pièce, écrite en 1981, jouée puis interdite, saisit le tournant historique où d’anciennes rigidités s’effondrent. Eléna s’y accroche mais sa conviction est trop véhémente pour être vraie.

Ses élèves essaient de la convaincre, puis passent aux menaces physiques. Devant le mal de la société, la vertu perd son sens. Les quatre jeunes sont joués par François Deblock, Molière de la révélation masculine pour son rôle de meneur du groupe, Gauthier Battoue, ancien de « Plus belle la vie », Julien Crampon en apprenti alcoolique, et Jeanne Ruff, qui finit autant victime que sa professeur.

Les comédiens se retrouvent après le drame : de g. à dr. Jeanne Ruff, François Deblock, Myriam Boyer,  Julien Crampon et Gauthier Battoue.

Les comédiens se retrouvent après le drame : de g. à dr. Jeanne Ruff, François Deblock, Myriam Boyer, Julien Crampon et Gauthier Battoue.

Le débit des paroles imposé par la mise en scène est si précipité que, pour plusieurs spectateurs commentant le spectacle plus tard, le dénouement n’était pas clair. Leur professeur jette enfin la clef par terre pour interrompre le viol de la jeune femme mais, chacun dégoûté par le résultat de cet affrontement, les élèves abandonnent. Les fautes dans leurs copies ne seront pas corrigées.

Au fond, Madame Rosa était pleine, Eléna est vide : en assumant l’une comme l’autre, Myriam Boyer touche à leur humanité commune.

denis.mahaffey@levase.fr

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