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Théâtre

Une enfance volée en danse et en paroles

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L'art du spectacle vécu

« Chatouilles » est un spectacle dansé et parlé. Andrea Bescon, comédienne mais danseuse de formation, y raconte une enfance gâchée par un ami de la famille qui lui faisait ce qu’il appelait des « chatouilles » et qui étaient des abus sexuels. Elle joue tous les rôles, la petite et la grande Odette (nom de l’héroïne du ballet « Lac des Cygnes », victime s’il en est), ses mère et père, l’abuseur et tous ceux qui gravitent autour.

"Je ne suis pas malheureuse, je suis en colère !"

“Je ne suis pas malheureuse, je suis en colère !”

Les rôles se succèdent avec une dextérité déroutante, et elle peut passer de l’évocation de sa détresse à un extrait de comédie musicale sans une seconde de transition. Le policier qui reçoit enfin sa plainte, et qui ne s’enthousiasme que quand elle parle de « pénétration » – car jusqu’à là on n’accusait l’abuseur que d’attouchements, est assis les jambes écartées, pour montrer que c’est le chef et un homme. Odette, toute timide, serre les genoux. La seule alternance des postures, les jambes qui s’ouvrent et se ferment comme un casse-noisette, dynamisent l’échange. Le comique se mêle au dramatique pour créer des moments puissants de théâtre distancié.

Aussi bien le texte que les gestes et les expressions reflètent un sens minutieux de l’observation, ce qui est tout de même le fondement de l’expression artistique.

Généralement dans un tel spectacle le texte porte le sens et le mouvement l’illustre. Mais dans « Chatouilles » le flux de mots se précipite sans relâche, comme une pluie battante sur un toit en tôle, et c’est la danse, exprimée par le corps et le visage, qui donne du mordant à ce qui est dit, le résume, le développe.

La mise en scène méticuleuse dans tous ses détails et ses rebondissements est d’Eric Métayer, déjà venu au Mail en 2011 avec « Les trente-neuf marches », adaptation – loufoque c’est peu dire – du livre de John Buchan. Tous les rôles féminins étaient tenus par… Andrea Bescon.

Longtemps la souffrance d’Odette n’est ni remarquée ni admise. Mère et fille se retrouvent enfin chez un psychologue. La confrontation devient brutale d’incompréhension : la fille crie son angoisse, la mère, qui ne se soucie que d’écarter sa propre responsabilité, l’accuse, cinglante : « Tu es malheureuse, l’as toujours été. » « Je ne suis pas malheureuse, je suis en colère » répond Odette. Dans un sens, c’est sa colère qui la sauve, lui donne la force de réagir, mettre sa vie en ordre et repartir. L’avenir l’a en réalité amenée devant nous dans ce spectacle, car elle a tiré l’histoire de sa propre expérience.

denis.mahaffey@levase.fr

DM râle :
Le spectacle, affiché complet depuis des semaines, s’est pourtant joué devant une salle dont un quart des places était vide. La raison ? Il était gratuit, offert par le Département dans le cadre du « Printemps des conteurs » annuel ; combien de gens ont réservé au cas où une petite envie les prendrait de venir, puis n’y ont plus pensé le soir même ?

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