Dominique Natanson est un militant, connu et reconnu à Soissons pour ses multiples engagements politiques, humanitaires, sociaux, pédagogiques. S’il fallait définir le facteur qui le guide dans ses activismes, ce serait sa détermination à « ne jamais être du côté des bourreaux ».
Il est sur la brèche dès qu’il constate un abus d’autorité, un refus des droits des sans-papiers, des ouvriers, des minorités, des opprimés partout. Ancien professeur, il défend une pédagogie qui implique les élèves dans la gestion de leur classe.
Auteur, il a écrit de nombreux livres pour appuyer son action. Certains sont publiés chez d’autres éditeurs, mais en 2012 il a créé sa propre maison d’édition, DN Editions, devenues en 2018 « Editions de l’Echelle du Temple » (le siège étant situé dans cette rue à Soissons), dont la première publication a été les œuvres poétiques de Daniel Lefèvre, poète normand et oncle de Dominique Natanson.
Pourquoi ils ont tué Charlie ? Ed. L’Echelle du Temple 2020
Il a publié aussi ses propres livres, dont une série de roman policiers « décoloniaux », offrant l’action et le suspense du genre, mais mettant en lumière les abus commis contre les populations issues du passé colonial. Le plus récent est Quand bave la police, qui raconte la mort du jeune Babacar Dyoula et l’enquête ardue pour découvrir la vérité. L’histoire est racontée par le petit frère Adama âgé de dix ans, qui parle avec les tournures employées dans son quartier. Cela donne une immédiateté et un réalisme saisissants, mais l’auteur précise qu’il n’essaie pas de reproduire ce langage, seulement de donner de la saveur sans dérouter le lecteur, un choix de style qui l’a amené à faire des recherches dans des dictionnaires spécialisés et auprès des populations.
« Ecrire un livre me prend 15 mois : 4 d’écriture, un mois d’intense réflexion, et 10 mois de relecture » déclare Dominique Natanson.
Les Editions de l’Echelle du Temple ont publié en même temps leur deuxième livre d’un autre auteur, Pourquoi ont-ils tué Charlie ? de Guillaume Doizy. Cet auteur axonais raconte le destin trépidant de l’apprenti dessinateur Charlie dans la guerre de 14-18, destin prémonitoire de la tuerie de Charlie Hebdo.
L’auteur Dominique Natanson a publié des livres chez d’autres éditeurs. Il vient de terminer un Guide de Soissons Colonial, qui sera édité en partenariat avec Syllepse, maison d’édition parisienne et militante. « La ville de Soissons était située sur le Front pendant la guerre de 14-18, et il y a beaucoup de rues qui portent le nom de militaires. Je vais demander au Maire de Soissons de changer les noms. » Selon lui, ces militaires ont été responsables de l’exploitation des troupes coloniales le long du Front.
Sur un autre sujet, Dominique Natanson fait remarquer que « seulement deux pour cent des rues de la ville portent un nom de femme ! » Le féminisme, l’immigration, le sort des Palestiniens : la liste de causes que défend Dominique Natanson est longue, et son énergie en les poursuivant semble inépuisable. Il est présent à toutes les réunions, participe à toutes les manifestations. L’écriture est un autre moyen de lutte.
Quand bave la police, Ed. Echelle du Temple, Soissons 2020
Dominique Natanson passe actuellement à une nouvelle étape dans son action. Il ouvre les portes aux auteurs locaux cherchant à être publiés. « Le local est devenu important, comme pour la production de nourriture. Les grandes maisons d’édition sont submergées par des manuscrits qu’un auteur envoie en appuyant sur un bouton. »
Il sera un « éditeur à but non-lucratif. », sans rien en commun avec « des imprimeurs qui se disent éditeurs » qui acceptent avec enthousiasme tous les manuscrits soumis et les publient aux frais de l’auteur, « à compte d’auteur » et faisant une simple impression de fichiers fournis par l’auteur, sans un regard sur le contenu. Le contrat accorde en échange un petit pourcentage sur les ventes, et il n’y a pas de vrai effort de diffusion. L’industrie profite de l’aspiration à devenir « un auteur publié »
Les Editions de l’Echelle du Temple, en revanche, proposent de publier des ouvrages de fiction, des essais, des poésies, rigoureusement sélectionnés. « Pas que des livres engagés, mais des écrits de qualité. » Une fois le manuscrit accepté, Dominique Natanson veillera, en vrai éditeur, aux éventuelles erreurs et incohérences. L’auteur supportera le coût d’impression (par un imprimeur bordelais, le même que pour les recueils de poésie de L’Ail aux Ours, autre éditeur local), et encaissera le produit des ventes. L’écoulement de la moitié d’une première impression de 200 exemplaires devrait couvrir les frais.
Ce nouvel éditeur aspire à réunir des auteurs et des lecteurs axonais autour de beaux textes et d’idées mobilisatrices.
Lundis de lecture au café Le Bon Coin recevra Dominique Natanson le 16 nov. et Guillaume Doizy le 18 avr.
[Une version abrégée de cet article paraît dans le Vase Communicant N° 299.]