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Le Vase des Arts

Un monument au coeur léger

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L'art de Schumann

Quatuor Strada : Pierre Fouchenneret et Sarah Nemtanu (violons), Lise Berthaud (alto), François Salque (violoncelle) ; Théo Fouchenneret (piano)

Le récital du Quatuor Strada à la Cité de la Musique, c’est un peu le quatrième mouvement du Concerto pour trois orchestres, surtout que Pierre Fouchenneret, soliste et animateur de Scènes partagées, est revenu une semaine plus tard avec son propre quatuor, cette fois pour jouer, non pas Brahms mais Schumann – avec son frère Théo au piano.

Pour un concert symphonique, quand le chef lève son bâton ou sa main il donne la preuve de son autorité. Pour la musique de chambre, l’équivalent est l’échange de regards entre les instrumentistes, ou un regard commun vers celui qui va lancer la musique. C’est un geste, non pas d’autorité mais d’entente.

Les musiciens allaient témoigner de la richesse de l’année 1842 pour Schumann, en commençant par deux quatuors à cordes écrits comme cadeau d’anniversaire pour sa femme Clara. Il y figure tant de qualités pour lesquelles le compositeur est connu : finesse, sérénité, fougue, et la capacité de les marier avec un charme séduisant.

La même année Schumann a pris la décision de modifier le quatuor consacré en ajoutant un piano, lançant ainsi cette formation, qui allait être adoptée par bien des successeurs. L’instrument ajoute une toute autre dimension aux sonorités des cordes, qu’il accompagne ou domine.

Schumann aurait pu avoir besoin de s’y habituer mais, sans la moindre hésitation, il a composé un chef d’œuvre, terme à utiliser avec précaution mais pleinement justifié pour le Quintette op. 44.

Le premier mouvement commence tutti (5 instruments) sans préliminaires, une déclaration robuste du premier thème, que rejoint plus loin le second, non moins affirmatif mais moins vigoureux.

Le deuxième mouvement est plus hésitant, s’avançant avec précaution, puis prenant plus d’assurance, mais toujours retenu.

Le troisième est plein d’humour, le pianiste faisant et refaisant ses gammes, les cordes s’y joignant comme un écho, avant de passer à une chanson poignante, mais sans tristesse.

Le dernier mouvement constitue une sorte de promenade vers un but, puis devient plus réfléchi, avec une quasi-hésitation, avant de lancer une dernière déclaration, en terminant par des arpèges au piano.

Il a constitué la seconde moitié du récital, enregistré en direct, et attendu avec délectation par ceux dans la salle qui le connaissaient bien. Strada allait-il le réussir ? Un auditeur, qui admet avoir des réticences envers Schumann en général, a aimé « la façon dont la musique a circulé ». La beauté de cette interprétation du Quintette se trouve dans la subtilité avec laquelle les six instrumentistes ont partagé les priorités, en cédant la place prioritaire a l’instrument qui porte l’œuvre à tel moment : piano, violon, violoncelle, même alto.

Le Quintette op.44 est un monument dans le répertoire Romantique. Un monument ? Le mot est justifié mais certes paradoxal pour une composition si pleine d’exubérance. Un monument au coeur léger. C’est une belle illustration du Romantisme en musique, adaptant à chaque instant sa structure aux besoins d’une émotion lyrique. Ou plutôt, au lieu d’une structure elle suit un fil, celui de l’expression instante de son inspiration, comme le chant d’oiseau reflète les intentions de la grive, le merle, le rossignol.

Un commentaire ? denis.mahaffey@levase.fr

 [Modifié le 27/04/24 pour corriger une erreur de titre d’oeuvre.]

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